jeudi 29 décembre 2016

La fin de Yaya Jammeh, «ce fut trop beau pour être vrai !




Qui va arrêter Yaya Jammeh ? Personne ne sait. Yaya Jammeh serait-il un homme indéboulonnable ? Certainement que oui pour les superstitieux inguérissables,  les partisans du jugement facile et enfin ceux parmi les sénégalais qui jouent à on ne sait à quel jeu. Imprudemment et croyant être béni du diable, il vient d’organiser des élections qu’il a perdu devant un parfait inconnu : Adama Barrow, un homme inexpérimenté qui demande à être soutenu, encadré gratuitement par devoir, amitié et  hospitalité.

On ne le dit pas assez, puisque c’est une honte,  Yaya Jammeh a bénéficié de soutiens au Sénégal, dans l’opinion, dans la bouche pleine de certains analystes politiques, des artistes et des sportifs qui s’en vont faire leur cour à Banjul. C’est connu, qu’il s’agisse de Laurent Gbagbo, de Dadis Camara ou de Yaya Jammeh, des mercenaires accoutumés au soutien intellectuel et médiatique ont été activés. Yaya Jammeh a distribué de l’argent. Ah que le monde a changé ! Quand je pense que la cantatrice Sénégalaise Khar Mbaye Madiaga a refusé à l’époque d’aller se produire devant le dictateur de Bangui Jean Bedel Bokassa.

« Il nous faut un homme comme Yaya Jammeh » entend-on souvent dire dans la rue. C’est important la rue ! Elle est peuplée d’électeurs non négligeables qui fantasment et ergotent sur un ordre à venir, un messie en treillis qui va sauver notre pays, nous débarrasser de cette  démocratie inutile. Dans un pays où la parole se transforme en flot déferlant , péroraison, caquètement et parfois braiement à vous tuer l’âme, il est loisible de dire des âneries quand on a jamais mis les pieds dans la prison de Mana Konko, le mouroir de Yaya Jammeh, le  bagne de Taoudéni au Mali où Moussa Traoré a envoyé l’écrivain Ibrahima Ly (lisez « Toile d’araignée »), la prison de Oualata en Mauritanie qui a tué l’écrivain Ten Youssouf Gueye et le sinistre Camp Boiro en Guinée où périt de diète noire Diallo Telli. Quand on n’a pas de problème, on cherche des problèmes. A force de  vivre dans l’ordre on rêve de goûter au désordre. C’est du tourisme imbécile ! Une sorte d’exotisme mortel.

S’il ya plus de justice, de liberté et de respect des droits humains en Gambie qu’au Sénégal, de foi et de prospérité économique dans ce pays qui n’appartient pas à Yaya Jammeh ils n’ont qu’à renoncer à la nationalité du pays de Blaise Diagne, Lamine Gueye, Ngalandou Diouf, Mamadou Dia, Valdiodio Ndiaye et Léopold Sédar Senghor , le pays du grand Khaly Ammar Fall, Thierno Souleymane Baal, El Hadji Oumar Tall Al Foutihou, Cheikh El Hadji Ibrahima Niasse et Cheikh Moussa Kamara. Il est difficile d’écrire un texte patriotique en ce pays. Le chauvinisme grand-Ouolof est ailleurs, dans les gestes, les manières mais non dans la littérature. Il ne nous servira à  rien lors d’une grande confrontation. Quand il s’agit de foncer on commence à invoquer une molle doctrine diplomatique, à jouer au raffiné partisan de l’observation inutile. L’essence de la  Realpolitik en diplomatie n’appartient pas à Bismarck, elle a existé bien avant lui, même s’il en est le porte-flambeau.  Avec Yaya Jammeh il n’ya que la Realpolitik qui vaille aujourd’hui, c’est-à-dire la diplomatie de la force contraignante.
 Ceux qui regrettent  Jammeh n’ont qu’à s’exiler en Gambie et confier leurs litiges à des juges nigérians, ghanéens et libériens, loués et achetés par Yaya Jammeh pour prononcer ses sentences macabres contre les opposants. Yaya Jammeh est une honte pour la commission africaine des droits de l’homme mais surtout pour les intellectuels africains, la gauche africaine. On l’a laissé trop faire. La Gambie n’intéresse personne sauf quelques organisations occidentalisées qui aujourd’hui se pourlèchent les babines croyant que la Gambie est maintenant prenable. Les nouvelles autorités devront faire gaffe. Il ne faudra pas qu’ils jettent le bébé avec l’eau du bain. Après Jammeh ils vont se jeter sur la Gambie comme des rapaces. Un défi immense pour Barrow : Eviter le désordre et le chaos après la libération mais élaborer une  diplomatie africaine et nationale.  Le glas a déjà sonné mais il ne l’entend pas le sourd! Les gambiens adorent les sénégalais, mais Yaya Jammeh déteste le Sénégal !

Yaya Jammeh serait même un ami de Dieu, un marabout détenteur de pouvoirs mystiques, un panafricaniste. Yaya Jammeh panafricaniste ? Ce monde n’est pas sérieux ! Tous les grands  combats, les nobles causes pour la restauration de la dignité humaine sont parasités par de grands enfants qui déblatèrent des choses qu’ils ignorent, des opportunistes guidés par l’argent et des comploteurs à la solde qui savent ce qu’ils font et sont prêts à toutes les manipulations pour alimenter leur combat d’arrière-garde. Personne n’ose leur dire « taisez-vous !» Tous les souteneurs se  sont rangés aujourd’hui parce que l’homme est fini.

Yaya Jammeh est un panafricaniste pour ces jeunes et vieux qui n’ont aucune envergure. Un panafricaniste est aujourd’hui un africain qui a l’injure anti-occidentale à la bouche. C’est trop simple, trop facile et même écœurant. C’est à vomir si on écoute ces manières puériles de défendre l’Afrique. Il y en a même qui verse dans le racisme anti-arabe. Les groupes qui les abritent ne s’intéressent même pas à leur orientation idéologique, il leur suffit d’entendre quelqu’un qui a le toupet de dire que l’occident est le mal absolu et c’est tout. Voilà la définition actuelle du panafricanisme qui fut naguère éminemment politique et scientifique pour des hommes valeureux comme Marien Ngouabi. Il faut une forte préparation morale pour défendre l’Afrique. Sinon on risque de tomber dans la sensiblerie panafricaniste. Entre-temps Yaya Jammeh a tenté de supprimer tous les gambiens. Mais il a échoué. Il aurait pu tranquillement se retirer, mais il serait trop beau pour être vrai cette fin trop  facile de Yaya Jammeh. Il en a trop fait pour partir impunément. Il va payer d’une manière où d’une autre! 

Khalifa Touré



lundi 19 décembre 2016

Criminalité, littérature et peine capitale(suite et fin)





« Les gens se vengent des services qu’on leur rend » s’est évertué à dire avec  le raffinement impertinent qu’on lui connait,  le plus grand écrivain français du 20eme siècle, il s’agit de Louis Ferdinand Céline.

Ils ont beau dire et écrire, ces courageux et impétueux spéléologues de l’âme, ces écrivains d’exception, mais encore les êtres au cœur simple penseront toujours que les bonnes actions sont toujours saluées par la reconnaissance. Les  écritures sacrées renseignent que la plupart des hommes ne savent pas dire merci. C’en est devenu une « loi » qui coule dans la nature même de l’homme. « Ah que l’homme est vache !» Ils sont nombreux les hommes indignes et malveillants qui ont la haine au croc.  Contre leurs maîtres ils ourdissent les complots les plus infâmes. Ils brandissent le poing dans le dos du bienfaiteur naïf qui s’en va tranquillement le dos tourné à cet être mesquin qui cache avec l’habileté du diable la haine la plus terrible.  Peu s’en faut que l’imprudent bienfaiteur trébuche sur l’ombre même du criminel en puissance. La haine est parfois surréaliste.  Il est alors surpris, s’il a le temps de l’être, par une réponse aussi illogique que la félonie envers un ami, un protecteur. Fatoumata Moctar Ndiaye a certainement été imprudente comme tous ceux qui ne veulent pas croire au mal.

La mécanique du meurtre est alors enclenchée. Les plupart des petites gens considèrent les actes de bienfaisance comme une forme d’humiliation et  d’écrasement. Les plus grands actes de générosité attisent dans leur âme sombre la flamme noire de la trahison et du refus de reconnaissance. Pour la plupart des gens dire merci c’est se rabaisser. Quelle sottise  que cette manière insensée de regarder la  main qui donne! Il faut plus pour écraser le moi. Alors comme chien il faut mordre la main par qui le Créateur nourrit les êtres qui mangent et boivent à satiété, se reproduisent et périssent en poussière. Quel sort peu enviable ! La poussière est le meilleur ami de l’homme, elle est l’homme même.
C’est incompréhensible pour les gens simples qui veulent préserver la pureté de leur âme. Pour eux, penser à certaines choses est une manière détournée  de s’aliéner, d’adhérer au crime. Alors ils sont pris par surprise ! La fausse tyrannie des gens riches, leur arrogance qui n’existe que dans le regard des pauvres gens est un mobile qui détermine tout. « Ils ne peuvent pas être sincèrement bons ces gens là, ils sont trop riches pour l’être. Si ça se trouve ils ont volé leur argent. Tous les riches sont de voleurs. Ils ont tout ratiboisé nous laissant pantois près  de la table de jeu. Il faudra poignarder le fils et égorger la mère.  » Il l’a fait, le nommé Samba Sékou Sow. Il faut un certain cran pour tuer. La lame qui vrille, les carotides déchirés, le gargouillement, le sang qui gicle, le monde qui tourne, les restes de vie qui font  se débattre ce corps fébrile tombeau de l’âme. L’horreur ! La plupart des tueurs achèvent leurs victimes pour les faire taire. Les meurtriers ont peur, ils sont lâches. Peu s’en faut  qu’ils fassent dans leur culotte comme certains suicidés. Tout cela est la défaillance de l’ordre humain.
C’est alors qu’entra en scène Sow le chauffeur à la mine patibulaire. « Le moi est exécrable » dit-on. L’égoïsme est une forme de désespoir quant au  salut de l’autre. Le désespoir est un péché froid, celui de Samba Sow est le manque d’espérance en cette femme sa patronne et sa future belle famille, cette société inutilement matérialiste et consommatrice de produits périmés et même toxiques.  Le matérialisme des sociétés sous-développées est un matérialisme imbécile, improductif. Un écrivain désaxé pour les uns et conservateur-catho pour les autres  a écrit : « L’enfer c’est le froid »,  Georges Bernanos. Le plus froid des péchés est le désespoir qui est la disparition de l’espérance en soi. Le désespoir est une trahison de sa propre personne. Une forme de suicide, de fuite au devant des choses. Les désespérés ont le destin des « chairs à canon ». Ils se jettent littéralement à corps perdu dans ce qui leur donne une mort indigne. Tuer son bienfaiteur est un blasphème, un acte immoral, une défiance contre Dieu.  
 « Une société dont la machine à fabriquer le Bien est en panne est une société malade. Le Bien est une question de transcendance mais aussi un problème de possibilité sociale. Pour beaucoup de citoyens les logiques de survie auxquelles ils sont confrontés depuis les années d’ajustement structurelle diminuent les capacités de choix d’ordre moral et poussent à des solutions à la limite de l’honnêteté. Je pense aussi qu’il ya au Sénégal un problème de consensus moral. Depuis des années nous avons du mal à s’accorder sur ce qui est bien et ce qui est mauvais. Les espaces de consensus social se réduisent comme peau de chagrin. De plus en plus des hommes et des femmes passent à l’acte : corruption, concussion, prévarication, parjure, prostitution publique, détournements de biens publics, transhumance des électeurs, manipulations de toutes sortes allant de la sorcellerie au mensonge éhonté, violences physique et symbolique sur les citoyens sans parts … »
Ceci a déjà été dit et écrit il ya belle lurette. La répétition est une forme de gravitation qui révèle la persistance et même la rémanence d’un phénomène douloureux, lancinant autour d’un point fixe. C’est à croire que nous avons un destin de toupie. Tournant sur nous-mêmes comme un enfant dans son jeu, nous ne sommes même pas capables de jouir du vertige des bonnes choses qui élèvent l’âme. Ceci n’est que l’expression de la difficile évolution des sociétés humaines.

Khalifa Touré
Sidimohamedkhalifa72@gmail.com






jeudi 15 décembre 2016

Portraits de deux figures majeures de l’Islam au Sénégal



A l’occasion du Maouloud, célébrant la naissance du prophète Muhammad(PSL) le moment est venu de faire connaitre deux personnages historiques de l’Islam ne serait-ce qu’avec quelques lignes griffonnées par-ci par-là, histoire de montrer que l’Islam, la religion dominante au Sénégal, a épousé des contours différents et donné naissance à des figures religieuses tout aussi différents et valeureux selon leur époque.

Voici Mamadou Lamine Dramé, le grand résistant à l’assimilation coloniale. L’homme au destin émouvant et tragique. Voici le grand religieux Soninké qui voulait construire un empire musulman en Afrique de l’ouest pour faire face au projet impérialiste de la France coloniale. Mamadou Lamine est né près Kayes, dans l’actuel Mali, vers 1840, fils d’un marabout Soninké, Mamadou Lamine reçu une forte éducation islamique dès le bas âge auprès de son père à Bakel. Trop jeune pour suivre Cheikhou Oumar dans sa lutte armée, Mamadou Lamine baigna tout de même dans l’esprit de refus et de résistance à l’assimilation coloniale créé par le Jihad de Cheikhou Oumar Al Foutihou. Il se rendit à la Mecque, y resta pendant 7 ans et retourna lentement vers son pays. Une réputation de sainteté commence à naitre à l’évocation de son nom et des fidèles commencèrent à affluer de partout vers cet homme qui a très tôt compris les enjeux géopolitiques de l’époque et le combat culturel lié à la pénétration coloniale. A son arrivée « les blancs » étaient déjà bien installés. Néanmoins Mamadou Lamine souleva une lutte armée et mena la vie dure au colonisateur leur infligeant de lourdes perdes surtout à la bataille autour du poste de Bakel de février à Avril 1886. Traqués par les colons et leurs alliés africains qui le voulaient mort ou vif Mamadou Lamine fut gravement blessé à N’Goga Soukota près des rives de la Gambie. Il succomba à ses blessures le 12 décembre 1887. La trahison et la disparition de cet illustre résistant provoqua la soumission des peuples du Sud du Sénégal jusqu’à la Gambie et la jonction des possessions françaises du Soudan avec le Sénégal.

Quant à Cheikh Moussa Kamara il est sans conteste l’un des plus grands savants que la terre du Sénégal et même l’Afrique ait porté. Il vous suffira de faire un tour à L’Institut Fondamental d’Afrique Noire(IFAN) pour être édifié sur la stature et l’ampleur de ce savant originaire de la région naturelle du Guidimakha, né à Gouriki Samba Diom dans les confins de Matam en 1864.
Immense lettré en langue arabe Cheikh Moussa Kamara est un historien illustre dont la lecture est indispensable pour comprendre la vie des hommes qui ont habités le nord du Sénégal dans la deuxième moitié du 19ème siècle. En effet Cheikh Moussa Kamara s’est évertué dans une grande partie de ses œuvres à décrire et analyser les hommes de son époque. Ce qui fait de lui le plus illustre des anthropologues du Sénégal, reconnu en cela par d’éminents chercheurs dont David Robinson.

Aujourd’hui des savants de la diaspora noire particulièrement du Brésil viennent compulser son œuvre pour en savoir plus sur cet érudit dont un petit fils d’El Hadji Oumar dira ces propos qui se passent de commentaire « Cheikh Oumar n’est supérieur à cet homme que parce qu’il était guerrier, la différence, la seule, est que celui-ci ne porte pas d’armes».
Cheikh Moussa a adopté le rite Qadiriya après avoir fait ses humanités dans tous les foyers savants du Nord du Sénégal et de la Mauritanie glanant l’essentiel du savoir en grammaire, en Théologie, en Droit avant l’âge de 23ans. Cheikh Moussa Kamara est un surdoué précoce,  un don qu’il n’hésita pas à dire dans son autobiographie intitulée « Biographie pour contenter l’effrayé, l’inquiet dans la grâce étendue d’ALLAH, le Généreux, le Bienfaiteur » :

« Malgré mes dons intellectuels, je m'amusais beaucoup, je flânais souvent en restant peu de temps auprès de mes maîtres, aussi je n'ai développé mes connaissances qu'avec des lectures personnelles. Et c'est un don du ciel que j'ai compris la majeure partie du contenu des ouvrages que j'ai lus.''

Cheikh Moussa a impressionné tous les savants et souverains de son époque qui lui vouaient un immense respect malgré sa nature polémiste,  du Fouta Toro à Dinguiraye en Guinée, en passant par la Mauritanie. Il était l’ami des plus grands africanistes de l’époque dont Maurice Delafosse.
Cheikh Moussa Kamara a laissé à la postérité un volume impressionnant d’ouvrages allant de l’Histoire, à la Littérature, au Droit, à l’Anthropologie, à la Théologie et à la Sociologie. Jusqu’ici son œuvre n’a pas été l’objet d’une compulsion critique et systématique
Cheikh Moussa est aussi un poète inspiré dont les vers sont aujourd’hui déclamés par des chanteurs religieux qui ne le connaissent pas.

Ce grand Africain auteur du fameux « Zouhour Al Baçatine : florilège au jardin de l’histoire des noirs » qui avait une réputation de sainteté s’est éteint en 1945.
Nous pouvons retenir donc que le besoin impérieux et pacifique de fondation d’un Islam orthodoxe fondé sur la science et la justice a donné le grand Qadi Ammar Faal et sa célèbre université de Pire, la  violence inégalitaire de la  féodalité Denniankobé a provoqué la résistance intellectuelle et armée de Thierno Souleymane Baal, la violente pénétration coloniale a fait comprendre à  Cheikhou Oumar et ses épigones Mamadou Lamine Dramé, Amadou Cheikhou, Ahmadou Ndack Seck de Thiénéba et Maba Diakhou Ba qu’il fallait défendre les sociétés africaines et recréer des Etats puissants sous la bannière islamique, les suivants El Hadji Malik Sy , Cheikh Ahmadou Bamba et  El Hadj Abdoulaye Niasse plus jeunes, ceux de la dernière génération,  ont été confrontés aux impératifs d’éducation spirituelle essentiellement. Il fallait s’installer dans le cœur du système éducatif des masses pour empêcher le colonialiste d’accomplir son œuvre d’assimilation. Ce fut l’occasion d’une guerre secrète, mystique, intellectuelle et  finalement la popularisation de l’Islam, qui donc, est une œuvre commune embrassant toutes les époques  depuis les Almoravides et la conversion des premiers souverains africains.

Khalifa Touré






samedi 10 décembre 2016

Mais qui va arreter Yaya Jammeh ?







Yaya Jammeh serait-il un homme indéboulonnable ? Certainement que oui pour les superstitieux inguérissables,  les partisans du jugement facile et enfin ceux parmi les sénégalais qui jouent à on ne sait à quel jeu.

 S’il ya plus de justice, de libertés et de respect des droits humains en Gambie qu’au Sénégal, s’il ya plus d’Islam, de foi et de prospérité économique dans ce pays qui n’appartient pas à Yaya Jammeh ils n’ont qu’à renoncer à la nationalité du pays de Blaise Diagne, Lamine Gueye, Ngalandou Diouf, Mamadou Dia, Valdiodio Ndiaye et Léopold Sédar Senghor ; le pays du grand Khaly Ammar Fall, Thierno Souleymane Baal, El Hadji Oumar Tall Al Foutihou, Cheikh El Hadji Ibrahima Niasse et Cheikh Moussa Kamara. Ils n’ont qu’à aller se plaindre auprès de ce tyran adepte reconnu de la magie noire. Au passage la magie noire est punie de peine de mort en Shari’a. Je vous renvoie au Fatkhoul Baari de Ibn Hadjar Al Asqalani. Cette opinion est Ijma c'est-à-dire consensuelle par toutes les écoles juridiques. Ils n’ont qu’à s’exiler en Gambie et confier leurs litiges à des juges nigérians, ghanéens et libériens, loués et achetés par Yaya Jammeh pour prononcer ses sentences macabres contre les opposants, les journalistes et les pauvres étudiants. On a tous compris !  Il n’a qu’à continuer ses sacrifices humains sous couvert de peine de mort, de traque des homosexuels, des opposants et des journalistes. Maintenant il s’en prend à de pauvres sénégalais qui ont commis l’imprudence de s’aventurer au-delà des frontières. Il n’a qu’à les tuer, s’il le veut, le justicier de pacotille! Yaya Jammeh est une honte pour la commission africaine des droits de l’homme mais surtout pour les intellectuels africains, la gauche africaine, les panafricanistes et les lobbyistes. Oui ! les lobbyistes qui peuvent faire quelque chose. Lors de la visite de Barack Obama au Sénégal Yaya Jammeh « le guerrier » a fait des pieds et des mains pour se faire inviter. « For God’s Sake invitez-moi, je ferai tout ce que vous voulez, ngir Yallah !!»  Pas bête le bonhomme devenu trapu à force de s’engraisser. Il a peur de l’isolement. Mais il est surtout réaliste. Il se dit que la Gambie est un petit pays qui n’intéresse personne, je peux pilonner, moudre et ratatiner qui je veux, les occidentaux ne lèveront pas le petit doigt. Mais on verra. Ceux qui croient savent que la justice divine existe. Il touchera un jour à l’intouchable ! Les gambiens adorent les sénégalais, mais Yaya Jammeh déteste le Sénégal ! « Vous jouez comme d’habitude au futé vous les sénégalais, mais vous verrez, je vais vous faire miroiter votre pont, mais vous ne l’aurez jamais ! » Voilà l’arme absolue contre le Sénégal.

Yaya Jammeh serait même un ami de Dieu, un marabout détenteur de pouvoirs mystiques. Aujourd’hui c’est un islamiste parce que qu’il traque les homosexuels et applique la peine de mort. Ah oui ! George Bush père est un islamiste parce que c’est un partisan irréductible de la peine de mort et la non-légalisation de l’homosexualité. Piètre définition du bon musulman ! Les droits de l’hommistes et les religieux chrétiens de la Gambie qui attaquent ce dictateur ubuesque sous l’angle de l’Islam ont un autre agenda. Ce n’est pas sérieux ! L’anti-islamisme et son succédané qui est l’anti-jihadisme opportuniste est devenu aussi un Jackpot pour beaucoup de gens qui en vivent. Personne ne veut  entendre la vérité ! Ils savent bien que Yaya Jammeh n’est pas un islamiste, il n’a aucune filiation idéologique avec l’islamisme. Il n’est rien de moins qu’un tueur narcissique. Ce monde n’est pas sérieux ! Tous les grands  combats, les nobles causes pour la restauration de la dignité humaine sont parasités par de grands enfants qui déblatèrent des choses qu’ils ignorent, des opportunistes guidés par l’argent, et des comploteurs à la solde, qui savent ce qu’ils font et sont prêts à toutes les manipulations pour alimenter leur combat d’arrière-garde. Personne n’ose leur dire « taisez-vous ! », à commencer par l’avant-garde de la gauche nationaliste africaine qui n’est même pas au courant des dérives, des déviances et de la récupération racialiste des thèses de Cheikh Anta Diop dans les réseaux sociaux. Des individus mal intentionnés sont en train d’utiliser la plate-forme intellectuelle du Sénégal pour véhiculer les divisions ethno-religieuses d’un pays d’à-côté. Ils investissent les réseaux sociaux et utilisent des relais médiatiques locaux pour fouetter la fibre « nationaliste » anti-arabe et soi disant pro-africaine.

Quant à  Yaya Jammeh il serait même un panafricaniste pour ces jeunes et vieux qui n’ont aucune envergure. Un panafricaniste est aujourd’hui un africain qui a l’injure anti-occidentale à la bouche. C’est trop simple, trop facile et même écœurant. C’est à vomir si on écoute ces manières puériles, dangereuses et réactionnaires de défendre l’Afrique. Il yen a même qui verse dans le racisme anti-blanc et anti-arabe. Les groupes qui les abritent ne s’intéressent même pas à leur orientation idéologique, il leur suffit d’entendre quelqu’un qui a le toupet de dire que l’occident est le mal absolu et c’est tout. Voilà la définition actuelle du panafricanisme qui fut naguère éminemment politique et scientifique pour des hommes valeureux comme Cheikh Anta Diop, Marien Ngouabi, Modibo Keïta ou Julius Nyerere. Il faut une forte préparation morale, scientifique et théorique pour défendre l’Afrique. Sinon on risque de tomber dans la sensiblerie panafricaniste. Entre-temps Yaya Jammeh aura tenté de supprimer tous les gambiens. Mais il ne le peut. La colère de Dieu s’abattra sur lui ! Allah protège la Sénégambie !

Khalifa Touré



Article publié dans LE QUOTIDIEN en Avril 2016, nous avons cru bon de ne le « retoucher » parce que rien à changer. « La fin facile de Yaya Jammeh », trop beau  pour être vrai. A suivre !

lundi 5 décembre 2016

Criminalité, littérature et peine capitale(1)







Trois chefs-d’œuvre de la littérature mondiale suffisent pour comprendre le phénomène criminel dans ses multiples dimensions, anthropologique, sociale et psychologique : « Crime et Châtiment » de Fiodor Dostoïevski, « Lumière d’Août » de William Faulkner et «  La beauté tôt vouée  à se défaire » de Yasunari Kawabata.

Ils meurent tous les jours des hommes et femmes par la main de l’homme, pourtant leur prochain. Ceux qui vont mourir vous saluent, bientôt assassinés par leur semblable. Une femme est morte au Sénégal égorgée par son confident de chauffeur. Le fait défraie la chronique, les colères passagère, empruntée ou sincère montent des cœurs endoloris par un crime abject. Le consensus moral est menacé ! Le rétablissement de la peine de mort est vivement demandé par une population interloquée au moment où l’élite intellectuelle francophone et l’Eglise du Sénégal s’insurgent de façon presque unanime contre la restauration de la peine capitale qui n’a  du reste jamais été appliquée sauf en de rares occasions à l’époque du poète négro-africain, Président, catholique, humaniste et académicien français Léopold Sédar Senghor qui était ouvertement anti-abolitionniste.

Autant dire que tout est en l’homme, dans son profil qui informe son opinion. Des institutions sont anti-abolitionnistes hic et nunc (ici et maintenant) parce qu’en face et pour des raisons intelligemment opportunes ils craignent la montée de l’intégrisme qui menacerait leur existence, mais ailleurs et autrefois avec les mêmes références religieuses ils appliquaient la peine capitale. C’est compliqué tout cela si l’on ne connait pas les craintes et les aspirations cachées. Il faut savoir évaluer l’échelle des valeurs dans la rhétorique anti-abolitionniste pour avoir une idée de ce qui passe. « La plupart des gens ne savent pas » parce qu’ils ne s’en tiennent qu’à  l’opinion. Ce que l’on  dit n’est pas forcément ce que l’on est !

Lorsque François Mitterrand le socialiste-humaniste, ancien vichyste, agnostique et jésuite défroqué a décidé d’abolir la peine de mort par la langue éloquente de l’Avocat-juriste et franc-maçon Robert Badinter, l’écrasante majorité de l’opinion française était favorable à la peine capitale. Elle a été abolie contre le cours des choses et des hommes. Ce fut pour des raisons humaniste et matérialiste. Le progrès et une idéologie. Les abolitionnistes ont pris le temps de s’installer dans les appareils idéologiques, l’école, les media, c’est de bonne guerre. Il faudrait qu’ils comprennent à rebours que les anti-abolitionnistes se sont aussi incrustés à travers les âges, les coutumes et les traditions religieuses qui fondent le socle du consensus moral dans bien des cultures. Des sociétés hypermodernes et même postmodernes comme le Japon sont anti-abolitionnistes invétérées. La peine de mort n’est synonyme d’archaïsme que pour les incultes et les partisans de la guerre idéologique. L’humaniste et  jeune Victor Hugo, aurait suffi avec son très précoce « Le dernier jour d’un condamné » pour convertir  les partisans de la peine capitale. Et Léon Tolstoï, le géant ! Plus intelligents, plus cultivés, plus fins et plus éloquents que les abolitionnistes médiatiques d’aujourd’hui, ils n’ont pas pour autant convaincu bien des lecteurs-admirateurs qui dans l’échelle  des valeurs placent la foi au Seigneur de la vie au dessus de tout. Les abolitionnistes, les bons, placent la vie de l’homme en haut de l’échelle, tandis que les partisans de la peine de mort pensent que « ce n’est que justice », la Justice prime sur la vie. Le Justice peut ôter la vie parce elle est un principe supérieur, immatériel. Pour eux, rien à voir avec la lutte contre la criminalité qui est une autre affaire liée surtout à l’éducation.

Tolstoï et  Victor Hugo pourtant abolitionnistes seraient en colère contre bien des abolitionnistes d’aujourd’hui. La plaidoirie insidieuse, sournoise, à travers  les groupes de pression a fini de rendre ridicule, banal et quotidien cette question radicalement philosophique et théologique qui touche même notre existence en tant qu’être humain. Si le comte Léon et Victor Marie Hugo n’ont pas convaincu de grands esprits comme l’écrivain arméno-américain William Saroyan, ce ne sont pas des droits de l’hommistes prêcheurs-imprécateurs qui vont le faire. Mais l’essentiel pour eux n’est plus de convaincre mais d’agir à travers les décideurs politiques et administratifs. Et la messe  est dite! Aux autres de se morfondre en leur colère impuissante. Voilà le monde comme il va !
Le conflit des mondes a fini par escamoter la littérature criminelle qui, plus profonde, va jusqu’à la racine des choses. Rien à voir avec les mauvais et même bons polars comme ceux de Chester Himes avec son étrange «  Couché dans le pain » et ceux de la légendaire Agatha Christie avec « Le crime de l’Orient Express », un chef-d’œuvre.

William Faulkner, Dostoïevski et Kawabata nous ont appris que l’acte criminel obéit à une mécanique implacable. Sans être dans le vulgaire déterminisme sociologique et même psychologique, les hommes ne sont ne sont pas prêts à tuer. Ils ne sont disposés à tuer que lorsque la machine criminelle se met en marche par une série incontrôlée de faits, d’actes et d’événements qui s’enchainent, s’entrechoquent vont crescendo et finissent par exploser par le meurtre. Ils sont happés, possédés par les événements qui les contrôlent. Raskolnikov a décidé de se débarrasser d’une exécrable vieille usurière, mais à un moment donné il ne peut plus faire machine arrière parce qu’il ne conduit pas la machine criminelle qui est entre des mains invisibles. L’homme qui tue est gêné par quelque chose dont il se débarrasse par la violence criminelle. Il tue pour être à l’aise, pour s’éloigner d’une impérieuse oppression interne. C’est de la folie ! Tous les tueurs ont raison, d’une mauvaise raison…une raison du diable. Il n’ya pas plus égoïste qu’un criminel, il ne voit que son bonheur sa paix intérieure exclusivement. (A suivre)


Khalifa Touré







                     

lundi 28 novembre 2016

Déguène Chimère Diallo, une femme du passé !




Qui la connaissait  réellement ? Peut-être personne. Seul Dieu sait ! Elle nous cachait tout son être, son être profond sous les oripeaux, les clinquants, le visage enfariné, les beaux habits, l’apparence, tellement d’apparence qu’en fin de compte nous ne voyions que cela, berné par notre inintelligence visuelle.

La beauté talquée de la poudre faciale qui rappelle le Kabuki japonais. Cet art de la représentation théâtrale où les personnages apparaissent le visage tout blanc d’une beauté de la mort joyeuse. Déguène Chimère était peut-être une artiste. Qui sait ? Elle se déguisait, se cachait sous des costumes hyper-colorés. Elle était adepte de la transformation de surface. Le public n’y voyait que changement…changement constant d’habillement. Si ce n’était que cela. L’Homme cet inconnu ! La femme ce mystère.

Happé par la surface glissante des choses chimériques nous ne voyions pas que son second prénom était un leurre. Chimère fait chic, bling-bling et branché pour les jeunes filles qui aimaient ces choses-là ! Une vraie créature à l’apparence flamboyante. Déguène Chimère avait un visage qui en disait un peu sur sa fin. Elle avait les yeux souvent embués de larmes et cela se voyait peu. Déguène Chimère est une beauté enfarinée. Elle nous cachait quelque chose, plein de choses qui nous faisaient jaser, médire sur sa moralité. Il est des êtres tellement dans la légèreté apparente  qu’ils nous cachent leur beauté profonde ! La beauté est certes dans la mort. On ne peut l’a saisir que dans cette fin prochaine qui ouvre une autre vie.

Déguène Chimère Diallo était une entrepreneure morale. Son job était de dire et de faire faire le Bien. Ah quel métier ! Dangereux exercice qui touche au Salut de l’âme. A la radio d’abord en « confidences » avec une voix doucereuse embuée d’interminables « MachAllah », de larmoyants «  Ndeyssane » et de ferventes « laa Khawla wa la qouwata illa billAh »….et puis ensuite à la télé ce petit écran cathodique qui prétend tout montrer et nous cache l’essence des choses. La télévision est une « vision » à distance. C’est la consécration pour beaucoup et la chute pour certain. Une simple apparition à la télé a  détruit bien des hommes ! Déguène Chimère est passée comme un météore et il ne s’est rien passé. Ni scandales mal étouffés, ni chamailleries inutiles et désobligeantes. La télé attire séduit et détruit les animateurs que l’on ne reconnait plus. Même des Oustaze en costume cravaté que certaines stars refuseraient de porter, tellement le déguisement sonne faux. Elle est passée indemne la Chimère. Mais comment a-t-elle fait ? Seulement rester dans le passé être fidèle à ce qu’elle fut naguère et même jadis c'est-à-dire Déguène Chimère Diallo tout bonnement, donc une femme du passé. Le mal est que les hommes et les femmes d’aujourd’hui ne veulent pas être du passé mais de demain. S’ils préféraient l’avenir soit, le monde irait mieux. Demain n’est pas forcément l’avenir, c’est le monde immédiat sans épaisseur, un jour incertain qui périra à coup sûr.

Il est passé inaperçu le traitement médiatique de sa dépouille mortelle. Ce n’est plus ici la télévision qui est en cause mais les réseaux sociaux où des insouciants se sont avisés à publier la dépouille, le linceul blanc visible, en porte -à- faux avec notre culture musulmane malikite et locale. Un marabout s’est même permis de publier la photo sur Facebook. Quand la folie de Facebook touche un marabout c’est le signe de quelque chose d’anormal à l’extrême. Cette manie à publier à tout bout de champ sur la toile, Déguène Chimère Diallo en a été la victime. Des internautes faussement illuminés sous prétexte de prêche se permettent de publier des images dégueulasses de corps en putréfaction. Ils sont tout simplement méchants !

En droit musulman, le traitement de l’image de la dépouille mortuaire est d’une délicatesse ! Au Sénégal particulièrement lorsqu’il s’agit d’une femme, les personnes chargées de déposer le corps dans le tombeau sont couvertes de drap en respect au principe de pudeur. Les derniers préparatifs pour « le repos éternel » dans le caveau sont ainsi dérobés du regard. Un accident est vite arrivé, le linceul peut se détacher. Il est rare même qu’un descendant de sexe masculin soit associé à cet exercice… par pudeur. Lisez attentivement « le livre des funérailles » dans « La Mouwwatta » de l’Imam Malick vous serez étonnés par l’extrême humanité du traitement des morts en Islam. Le rite Malikite est particulièrement sévère en la matière. Ce n’est nullement hasard que le Prophète (PSl) lorsqu’il s’agissait d’une femme se plaçait à hauteur de son milieu pour prononcer la prière mortuaire et pour un homme il se tenait debout à hauteur de la tête. En la matière le livre de Cheikh Hassan Ayyoub « Voyage vers l’éternité » est l’un des meilleurs. Mais lisez surtout « Le livre de l’âme » du saint homme Ibn Qayyim Al Djawzia, vous vous passerez de ces médiocres prêches à la Facebook et vous saurez définitivement que la mort est une vie. Vous serez pétris par le profond sentiment de vouloir rencontrer le Seigneur des mondes, vous n’aurez plus peur de la mort. Ceux qui désirent ardemment rencontrer Le Maitre Du Trône Immense mourront tranquillement. La Mort est un accomplissement pour ceux qui connaissent Dieu.

Cette mort qui en vérité est la station primordiale Déguène Chimère Diallo, l’animatrice de Télé, ne l’a voulu. La mort était déjà là présente lorsque nous n’étions pas encore. Elle fauche qui elle veut selon un décret enfoui dans le Livre Cacheté. Allah ait pitié de son âme !

KHALIFA TOURE

Sidimohamedkhalifa72@gmail.com

dimanche 13 novembre 2016

Donald Trump, Hillary et les politiciens.







Donald Trump gène beaucoup,  personne n’ose le dire. Il  est l’incarnation vivante faussement caricaturale, bruyante, théâtrale et excitée de ce qu’aurait voulu être tous les politiciens hypocrites de la terre.

Ils auraient tous aimé se rouler dans la fange politique comme un cochon, cet animal exécrable, moche comme c’est pas possible, au museau pointu et ressemblant tellement à l’homme ! La génétique vient de le trouver. Ils auraient tous aimé dire des cochonneries genre Donald Trump, proférer des polissonneries devant les enfants ébahis, provoquer l’ire des puritains qui se cachent sous leur froc.

Les politiciens de l’Establishment haïssent à mort l’homme Trump. Ils sont jaloux de sa  liberté à dire tout et n’importe quoi. Mais il ne faut pas s’y tromper, il n’ya pas un seul homme sur terre qui dit tout ce qu’il pense.  La chose est savamment orchestrée. Ils auraient tous voulu se défouler, les politiciens. Pour exemple Nicholas Sarkozy est un excité qui contrairement aux apparences, manque de confiance en soi. Il n’est pas du tout gentil. Un répétiteur indécrottable dira bêtement qu’un homme politique n’a que faire de la gentillesse. Il sera juste cette idée le jour où l’on prouvera que l’homme politique est un être sans âme. Qui n’a pas besoin de bonté naturelle, de gentillesse avenante ? Mais le serial Killer par excellence fut le fameux François Mitterrand, un homme totalement dépourvu de gentillesse sous couvert de talent politique, le plus méchant de la gauche. Un Chirac de la droite est plus humain, comme si l’affaire était une question de droite ou de gauche.

Au Sénégal on dit d’Ousmane Tanor Dieng qu’il est un monstre froid. Monstre on n’est pas sûr, mais froid oui ! Un froid glacial. Macky Sall n’a pas le sourire facile,  on ne sait pas trop ce que cela signifie. Idrissa Seck, on le dit vindicatif, mais personne n’ose faire du Trump sauf… François Hollande en privé qui a dit des mots qu’un président de la République ne devrait pas dire. Mais il est d’une autre espèce lui ! Sarkozy avait dit de lui que c’est un méchant. Mais personne ne l’a écouté. Et Jean François Copé le naïf qui pensait comme tout le monde que François Fillon est un gentil doux et prenable. Il l’a appris à ses dépend.

Quant à Donald Trump il est la partie honteuse de tous les spécialistes de la communication de cuisine. Ils ne pourront jamais nous expliquer comment un homme abonné aux grimaces et singeries a-t-il pu se faire élire président de la République dans le pays de la communication par excellence. Il est l’antithèse de tout ce qu’ils professent et enseignent dans les minables écoles de formation en gestion, leadership et autres insignifiances, j’allais dire « conneries » soi-disant scientifiques. Mais restons poli ! Le mot scientifique est la trouvaille du siècle dernier,  la contre-vérité pour habiller  n’importe quel gadget en mal d’existence. Claude Bernard et Auguste Comte se retournent dans leur tombe.  Lorsque l’on ne trouve plus rien à dire et que l’on est en panne d’idée on dit « c’est scientifique » en levant l’index au ciel tout en grimaçant. Je voudrais bien que vous excusassiez mon vocabulaire Trumpien (J’avance imprudemment l’imparfait du subjonctif comme gage pour quémander votre pardon). Les pompeux analystes de télévision qui ont prédit sa défaite ne feront pas leur mea culpa comme d’habitude. Ils ne présentent jamais les choses comme elles sont mais toujours telles qu’ils voudraient qu’elles fussent. Personne n’a  osé dire que Trump va passer. Même pas nous qui avons pondu ce texte quatre jours avant le scrutin. C’était clair, il allait passer, parce qu’en mécanique électorale lorsque l’on va crescendo il n’ya pas de raison que l’on descende brutalement à soixante douze heures. Les sondages aussi ont menti, c’est très clair. Ils étaient ouvertement pro-Hillary. Ceux qui font parler les chiffres mentent  aussi, ils ont provoqué la crise grecque. C’est « scientifique » tout cela !

Cela dit et ….écrit,  son prédécesseur devra beaucoup se morfondre ! Comment Barack Obama s’est arrangé pour avoir un tel homme comme successeur ? Trump est en partie l’œuvre de Barack Obama qui a déçu tout le monde et réveillé un vent de puritanisme anti-minorités aux USA. Certes faut-il reconnaître que son élection a réveillé de vieilles rancœurs racistes.  Il a passé huit années à défendre les minorités sauf les...noirs. Cet homme avait visiblement peur de Washington. Voilà le résultat ! Et comment les américains peuvent ils choisir une Hillary Clinton démodée, qui est là depuis toujours. Hillary une « femme nouvelle » ? Ah que non ! Elle est déjà fatiguée. Au moins elle n’est pas de l’acabit de Margaret Thatcher le monstre. L’Establishment politique mondial pense « bêtement » que les gens d’en bas n’ont pas les moyens de comprendre. Les gens d’en bas de l’échelle sociale ? Ils comprennent trop d’ailleurs. Et même leur compréhension leur joue des tours du genre… Donald Trump. Tout ce que le bonhomme à la coiffure difficile raconte n’est que le langage hypertrophié d’une rhétorique politique  seulement prise à l’envers.

Il a surfé sur l’inculture assumée. Une bonne partie de la classe moyenne inférieure  américaine et des couches défavorisées par le libéralisme  sont d’une inculture qui fait peur. Ils ne connaissent rien à la géographie mondiale et confondrait un Sikh enturbanné à un arabe forcément musulman. Et cela n’a jamais gêné personne, tant que le système, la machine Washington fonctionnait. Ils ont un système éducatif des plus inégalitaires au monde, les américains. Les États-Unis, c’est le pays des raccourcis par excellence, le pays le plus dynamique où tout est possible, même Donald Trump qui ne fera certainement pas tout ce qu’il a dit, c’est pas possible. Certains de ses partisans seront déçus ! 

 Les politiciens exercent le métier le plus dur au monde mais ils ont le malheur d’être les seuls à le savoir. C’est la rançon des malheurs qu’ils font aux populations une fois élus. Mais  « c’est bien fait pour la gueule des politiciens », comme dirait Trump. La tendance lourde au monde est que les peuples ne veulent plus de la dictature de l’Establishment, qu’il soit politique ou intellectuel. Les cadres, experts, consultants, politologues médiatiques, politiciens inguérissables auront fort à faire sous peu. Ils ont perdu leur autorité morale et c’est le début de quelque chose que personne ne peut deviner. LE MONDE NE NOUS APPARTIENT PAS. SOYONS MODESTES!

Khalifa Touré


lundi 7 novembre 2016

Mais qui a peur d’Ibrahima Sall, le poète africain?






« De nos jours, il n’est pas de pureté qui ne frise l’immoralité. Surtout chez ceux qui ne font jamais rien comme les autres. Les temps ont mûri et les romantiques déboussolés par l’agonie du Grand Siècle ont choisi le romanesque. Les solutions de facilité ou de lâcheté n’existent pas. Elles ne sont que la courbe démagogique de la dégénérescence de nos semblables. » Ibrahima Sall

Le cas Ibrahima Sall mérite d’être posé. Pour un cas c’en est un ! Voilà un homme à propos de qui, il se murmure qu’il est la plus fine plume vivante de la littérature sénégalaise d’expression française. Les « sachants » qui le disent, le font presque avec « stupeur et tremblement », tellement l’homme-poète-romancier-dramaturge-conteur-nouvelliste-Ibrahima-Sall est méconnu, effacé et enterré par une Littérature Nationale qui est plus scolaire que véritablement créative et artistique. Tellement méconnu qu’on le confond à El Hadji Ibrahima Sall l’économiste et ancien ministre et même à l’autre poète Amadou Lamine Sall. Ibrahima Sall est avec son œuvre une victime, le mot n’est pas trop galvaudé. Tous ceux qui aiment la littérature, l’association des écrivains, les  critiques, les universitaires et surtout le ministère de la culture sont interpellés. S’ils étaient conscients des enjeux véritables du rayonnement culturel, les batailles culturelles sous-jacentes autour du livre, la « chance » si ce n’est la providence d’avoir un homme qui écrit comme Sall aurait vraiment du sens.

Maître par excellence de la substantivation, son dépouillement stylistique va jusqu’à la disparition des verbes. Dans « Par-Dessus Cœur » son recueil le plus africain publié en 1994 aux défuntes maisons d’Editions Khoudia, il écrit brusquement, au détour d’un vers: « Indépendances de gérance/amours de saison sèche/liberté de minuit/république aux enchères. » Un risque énorme, un choix de style qui fait échos à une vie de  victime. Il l’a payé très cher ! Chez Sall il ya deux marques distinctives : Le complexe du bovidé, qui est la substance de sa source de création et la recherche d’un langage total, originel. Lisez le poème « Table » dans ANTILEPSE. Chez Sall il ya une tentation de l’inintelligibilité où le langage est libéré de sa fonction sociale ! Cette tentation vers « un mutisme complet » décelé par un certain  Roland  Barthes donne chez Sall la chose suivante : « Car j’ai eu l’imbécilité de t’inviter à décliner avec moi la solitude peuplée des fantômes de chair avec moi l’essence des remords reconduits sans taux ni pourcentage de bien-être tellement utile à l’agonie d’un vieux siècle je cherche à colmater avec toi les brèches qui vieillissent dans le demi-sommeil d’avec la gent humanité Un trou de souris rêve déjà vécu sublime égarement du félin qui oublie bêtement de sortir ses griffes avec toi Et quand je suis parti prier sur la tombe violée par ta quête mon petit-fils est mort dans les bras de tes dix ans » L’essentiel n’est plus dans la logique des mots mais au mouvement successif des images. C’est une forme d’écriture du silence, qui est le sommet même de l’écriture. Son « Guernica » est l’un des meilleurs hommages à Pablo Picasso.

L’essence de la littérature est dans la disparition, l’occultation-monstration. Sall fait disparaitre les mots et  les choses pour en faire apparaitre d’autres. Il est davantage magicien que prestidigitateur. C’est ainsi que son poème appareille vers une forme poétique de substantivation totale. On dirait que le poète tente de créer un langage total qui n’est fait que de substantifs : Les mots, rien que des mots en marche. Les mots qui s’en vont quelque part.
Ils sont rares les écrivains qui ont du style, les hommes qui ont quelque chose à dire comme le définit Arthur Schopenhauer. Ils sont rarissimes qui peuvent écrire ceci : « …La race aux abois brise les étreintes de carrefour, les urnes et les outres des aveux ancillaires. Sur les toits des colères s’érigent mes champs d’obédience que ne fouleront jamais les routiers de chimères. Depuis, je ne t’habille que de sexe à l’encan et ta progéniture court les baisers du temps qui se désintègre. Ce siècle, jamais nous ne saurons le vouloir : c’est une ère de puissants, puisant les semelles des cœurs. Vraiment un souffle au second horizon des prières d’enfer. »(Les Bouviers de l’au-delà). Nous percevons ce pressant désir d’ailleurs, cet éloge de la désertion vers un au-delà, à travers une écriture apparemment immédiate mais néanmoins travaillée. Sall est peut-être de la lignée des écrivains du courant de conscience. Les choses, les mots et les images qui ne vont pas ensemble dans notre sous-monde sont associés comme sur une image « négative » dans ce réel recréé à l’envers par Ibrahima Sall. Dans sa tentative démiurgique de recréation d’un monde, les images sont des idées. Sall donne ainsi raison au grand poète Serigne Cheikh Tidiane Sy qui pense que tout ce qui est immédiatement compréhensible n’est pas poétique.

Chez Sall la dilation de l’image et du temps déroute, les sentiments deviennent plastiques par un phénomène voisin de l’alchimie du verbe, un étrange  fétichisme des aisselles nous révèle cet appel du corps malgré l’esprit qui s’envole : « Les aisselles, ténèbres odorantes(…) » Pokhatane, le marabout-féticheur(…) Son ombre interrogeait le rictus du féticheur.» Voilà Ibrahima Sall dans « Les routiers de Chimère » le meilleur roman Sénégalais ! En tout cas le plus achevé avec « La Plaie » de Malick Fall et certainement « L’Aventure ambigüe ». Mais Sall est surtout un poète, le plus profond des poètes sénégalais. Un poète-versificateur, un poète-romancier, un poète-dramaturge, un poète-conteur, un poète-nouvelliste : Commencez d’abord par Les routiers de chimère, lisez ensuite La génération spontanée et alors maintenant le reste… Crépuscules invraisemblables, Le choix de Madior, Le prophète sans confession,  Les contes du sable fin, Par-dessus-cœur, Les mauvaises odeurs, un chef-d’œuvre mal édité et le dernier « Antilepse. »

On ne le dira jamais assez, l’écriture ne suffit pas, il ya surtout la réception critique au sens large du mot. Des jugements mais certainement pas derniers sont attendus. De toutes les façons ils pourront être infirmés et cassés par le temps et l’histoire. Même des jugements dits de valeur seraient les bienvenues  aujourd’hui. La situation l’exige. Nous ne sommes pas loin d’une crise de la vocation si l’on s’en tient au type de littérature produit par la plupart des faiseurs de livres ces dernières années. « Et si votre livre témoignait simplement de votre incompétence philosophique… » avait dit Jean Paul Sartre à Albert Camus à propos de « L’homme révolté ». Mais on sait ce qui est advenu des écrits des deux philosophes aujourd’hui. Sartre est presque enterré même si son cadavre bouge encore. Mais l’essentiel est qu’il avait osé critiquer un « pair ».

Le poète Ibrahima Sall est à l’ombre, il évite les feux de la rampe et les lambris dorés fussent-ils des feux qui éclairent. Cette attitude que l’on retrouve chez tous les grands écrivains, notamment William Faulkner qui a refusé une invitation à diner à la maison blanche ( alors qu’il souffrait de pauvreté), nous tentons d’en percer le mystère à travers ces mots plein d’énigmes dans les routiers de chimères « Guitche Manito…L’imbécile qui chaque jour crachait indifféremment ses poumons, celui qui voulait tous les intellectuels d’abord communistes  (…°)/En ce temps pourri qui m’oblige à cracher mes poumons, mon « communisme» est d’habituer mon peuple au goût de son propre sang. C’est la seule réaction saine qu’il me reste à léguer avant l’irréparable… » Le personnage aurait peut-être dit aujourd’hui « mon libéralisme » puisque le communisme était alors dans l’air du temps comme le libéralisme aujourd’hui. Tout compte fait, Sall n’aime certainement pas le mimétisme, ceux qui défendent des causes qu’ils ne comprennent pas. Il aurait comme Hamlet voulu soutenir de grandes querelles. Les génies sont rares dans une culture et Ibrahima Sall, l’est, sans tambour ni trompette. « Il n’ya pas de génie sans un grain de folie » disait Blaise Pascal, le locataire de Port-Royal. Mais la folie chez Ibrahima Sall n’est pas revendiquée, elle est là, présente à travers une écriture elliptique pour ne pas dire convulsive et épileptique. Sall nous rend malade par la fièvre de la création. L’un de ses personnages défigurés affirme: «  Le jour ou j’arriverai vraiment à fixer tout ce que je ressens sur une toile, la plus belle vérité de l’Humain semblera terne à côté. Je n’enserre encore que les contours de mes préoccupations. Rien que des embryons n’étant pas l’ensemble, un affaissement de similitudes, jurant toujours de leurs origines.»

Les écrivains Sénégalais n’ont jamais véritablement excellé dans la grande création formelle. Ils sont d’une pruderie stylistique agaçante et répétitive. Excepté Ibrahima Sall qui arrive en tête. Il est à cent coudées au dessus des autres, du moins en ce qui concerne la folie dans l’imagination. Ensuite arrive Nabil HAIDAR, Khady Sylla, Abdou Anta Ka,  Boubacar Boris Diop, Ken Bugul, Abass Ndione. Elle nous montre qu’il ya une crise de la créativité et de la vocation en littérature sénégalaise. Et cette crise de l’écriture, Sall a voulu l’éviter en écrivant des choses inimaginables comme cette colère scatologique à la page 64 dans Les routiers de chimères: «  Galaye donnait libre cours à ses fantasmes. Il imaginait un déluge qui jaillirait de l’immensité des latrines. Il serait fait des appétits de ses semblables, de leur suffisance et de leurs prérogatives. Un plat de choix pour les vers à l’affût dans la tombe. Galaye avait un problème. Il se demandait comment se faire scatophage parmi les gourmets. » Le monde est-il si dégueulasse que cela? demanderait-on au poète. Nos semblables sentent-ils si mauvais ? Mais pourquoi pourrissent-ils vivants ? Plus loin, la réponse est sans appel : « Riche ? Les excréments n’ont d’odeur tout comme le Dieu Argent. C’est une fosse commune pour les aisances de tout un chacun. Dieu sait que l’homme ne peut, ni n’a le droit de sentir mauvais. »  Voilà un ouvreur d’imaginaire qui ne trouve son équivalent qu’au cinéma avec Djibril Diop Mambety.

Comme son frère -en- la –poésie Gérald Félix Tchikaya U’Tamsi, on murmure partout que Sall est hermétique tout simplement parce que l’on ne veut pas entendre ce qu’il dit. Une forme de peur mesquine qui insinue que cet homme l’a bien cherché. Mais il n’est de sourd que celui qui ne veut pas entendre !

Khalifa Touré


jeudi 27 octobre 2016

Bob Dylan : un prix Nobel si controversé !




« Etre poète en temps de détresse, c’est alors : chantant, être attentif à la trace des dieux enfouis. (Partir) de l’essentielle misère de l’âge..» Martin Heidegger, Pourquoi des poètes ?

     L’auteur-compositeur-musicien-interprète et poète américain Bob Dylan vient d’obtenir le prestigieux Prix Nobel de Littérature« pour avoir créé, dans le cadre de la grande tradition de la musique américaine, de nouveaux modes d’expression poétique » selon les mots de l’Académie suédoise.  Une fois n’est pas coutume pour l’Académie, réputée pour sa propension à primer des œuvres linéaires, des auteurs non-populaires réputés pour la fadeur, la tiédeur  et la grisaille de leurs textes littéraires, du moins pour une catégorie particulière de lecteurs. Pour une surprise c’en est une !
 Mais le fait notable est la colère provoquée par un tel choix auprès de certains écrivains comme l’écossais Irvine Welsh, l’américaine Joyce Carol Oates et le français Pierre Assouline.  Quant à Salman Rushdie et Alain Mabanckou ils approuvent à demi-mot avec beaucoup de pudeur. Une attitude « courageuse » lorsque l’on sait que la jalousie est le péché préféré des savants et autres écrivains. Beaucoup n’oseront ruer dans les brancards de peur d’être accusés  de  jalousie  et de mauvais perdants. On oublie que naguère « L’immense critique littéraire  et par ailleurs professeur de littérature scandinave Knut Ahnlund, membre de l’académie royale a claqué violemment la porte du jury en s’opposant vertement à la nomination de l’autrichienne Elfriede Jelinek, auteure de « La pianiste » qui a du reste été portée au cinéma par le talentueux metteur en scène autrichien Michael Haeneke. Elle n’avait écrit que depuis dix ans seulement. Knut Ahnlund avait estimé que le choix porté sur Jelinek est « un choc d’une extrême gravité ayant causé des dommages irréparables à la littérature de manière générale et à la réputation du prix en particulier. » Les controverses ne datent donc pas d’aujourd’hui. Mais bon sang ! un prix Nobel de littérature qui est passé à coté de Léon Tolstoï, Emile Zola, Franz Kafka, Marcel Proust, Jorge Luis Borges et Aimé Césaire mérite-t-il le courroux enfiévré des seigneurs de l’écriture littéraire ? 

Il existe  une écriture littéraire, une écriture musicale et une écriture cinématographique. Le langage littéraire qui n’est pas forcément fait de codes académiques n’est pas le langage musical. Sans verser dans une sémiocratie ringarde qui a déjà connue bien des limites, on peut dire que tout est dans le signe. La sémiologie littéraire est évidemment scripturaire alors que « l’empire des signes » de la musique est tonal. L’on pense souvent que seule la musique classique est tonale, mais tous les grands musiciens populaires n’ont pas échappé à la « règle » de l’exécution tonale.
 
Sans toutefois revendiquer un quelconque don de prophétie, il ya quelques années  nous avons écrit la chose suivante dans « Pourquoi tant de poètes ? » : «  On oublie souvent que le grand musicien Bob Dylan est pressenti pour le prix Nobel de littérature depuis des années. Beaucoup de poètes ont à apprendre de la verve torrentielle de mots sortis de la bouche d’un musicien « anarchiste » comme Georges Brassens. Que dire de Jacques Brel aux textes larmoyants et évocateurs ? Quant à Serge Gainsbourg il a confessé que son courage à chanter lui vient de l’écrivain  Boris Vian lorsque ce dernier a déclamé « Le déserteur » avec cette désinvolture légendaire qu’on retrouve au Sénégal chez Souleymane Faye et Wasis Diop particulièrement, à plusieurs variantes près. Qui ose dire que des musiciens étranges comme Miles Davis ou bien aujourd’hui Jim Jarmush, Iggy Pop et Brigitte Fontaine ne sont pas des poètes ? »  « La foule » d’Edith Piaf est l’un des textes musicaux les plus poétiques jamais interprétés ; la plus belle chanson au monde…que j’aie écoutée. Il ya plus de concordances internes entre images et sonorités que dans bien des recueils de poèmes. 

Bob Dylan est incontestablement un poète mais tous les poètes ne sont pas des écrivains et tous les écrivains ne sont pas des poètes non plus. Voilà le grand dilemme ! Il ya bien moins de poésie chez Paolo Coello que chez Bob Dylan. L'écrivain le plus lu au monde ne  mérite pourtant pas le prix Nobel au vu de certains critères puristes. A côté, les écrivains les plus « profonds », les plus larges, les plus détachés, les plus constants en « leur chose » comme le tchèque Milan Kundera, le japonais Haruki Murakami, le syrien Adonis, le Kenyan Ngugi Wa Thiong’o, les américains Don De Lillo et surtout Phillip Roth ne l’ont pas encore obtenu. Un véritable scandale que l’académie devra réparer. Dylan le musicien iconoclaste va peut-être ouvrir la porte du Prix Nobel à ces écrivains « populaires » que l’Académie de Suède regarde avec morgue depuis des années. Bob Dylan est un immense musicien-poète, mais il n’est pas pour autant, un écrivain. 

Khalifa Touré
Sidimohamedkhalifa72gmail.com