Voici le professeur Mamadou Diouf, historien
Sénégalais né à Rufisque en 1951 à
la fin du cycle colonial. Rufisque, une des quatre communes sénégalaises où
l’on naissait citoyen français « selon une logique de l’Empire »
dit-il.
Mamadou Diouf qui est devenu aujourd’hui un
penseur en insurrection aime à dire de façon ironique qu’il est né français
avant de devenir Sénégalais. « J’ai
passé plus de 10 ans en France, mais je ne suis pas français, je suis
sénégalais.»
Mamadou
Diouf est un insurgé contre la pédagogie de la répétition qui a court dans les
milieux scolaires et universitaires en Afrique, un rebelle contre le « néo-européocentrisme » qui sévit
surtout en France. Il a prôné et pratiqué la déconnection de la
« bibliothèque coloniale » en s’intéressant à l’Histoire de l’Inde
particulièrement et surtout aux subaltern
studies.
Mamadou
Diouf dirige aujourd’hui l’Institut
d’études africaines de la Columbia University à New York depuis 1999.
Spécialiste de l’histoire coloniale, il soutient à Paris une thèse sur
l’histoire du Kajoor au 19ème siècle avant de diriger pendant huit
années le département de recherche et de documentation du Conseil pour le développement de la
recherche en sciences sociales en Afrique (CODESRIA).
Avec son complice Achille Mbembe il n’a de cesse de prôner la morale qui dicte de «
se tenir debout par soi-même » ;
une qui doit passer inéluctablement par
une attitude insurrectionnelle. « Il faut penser contre son marabout, penser
contre son maitre » affirme-t-il
selon la vieille logique du disciple-adversaire comme ce fut le cas en
Djouneydi et Halladj, Platon et Aristote, Marx et Hegel.
Aujourd’hui,
son intérêt pour l’histoire contemporaine et les études postcoloniales font de
lui l’un des meilleurs historiens d’Afrique avec ses compères Achille Mbembe et le très discret Momar Coumba Diop.
Ses écrits
historiques, politiques et sociologiques sur le Sénégal sont d’une finesse
telle qu’ils devraient entrer en ligne de compte dans l’élaboration des
politiques publiques si tant est qu’il est possible de jeter un pont entre les
universitaires et les hommes politiques. Lisez « Le Sénégal
sous Abdou Diouf(Karthala, 1990). », Le Nationalisme, le Colonialisme et
les Sociétés post-coloniales (Karthala,
1999) ;mais
surtout « une histoire coloniale, le modèle
islamo-ouolof et ses périphéries (Maisonneuve et Larose, 2001) ;». Depuis 2002, il publie en Anglais.
Mamadou
Diouf est un homme charmant qui soigne sa mise, s’exprime bien en français
comme en Anglais. Son intonation particulière est presque familière aux
auditeurs de RFI, surtout les inconditionnels du « Débat Africain »
animé par Madeleine Mukamabano.
KHALIFA TOURE
« Certains spécialistes du politique en Afrique disent que les systèmes politiques ne marchent pas parce qu’ils sont étrangers aux sociétés africaines, alors que d’autres affirment au contraire que la persistance des cultures politiques « traditionnelles », le clientélisme et la néo-patrimonialisation, sont les causes de la mauvaise gouvernance en Afrique. Ma réflexion prête plutôt attention aux formules de convergence et de divergence entre des cultures préexistantes et des formules administratives étrangères à des sociétés à qui elles ont appliquées ou qui se les appliquent à elles-mêmes sans discernement. »
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