jeudi 21 juin 2018

HENRI CURIEL JUIF MILITANT ET PRO PALESTINIEN





 









 
Voici quarante ans que mourrait assassiné Henri Curiel sous les balles d’on ne sait encore qui, sauf ceux qui ont exécuté cet acte ignoble et les affreux qui l’ont commandité. Juif égyptien d’origine italienne né de parents francophones, voici l’un des militants anticolonialistes les plus généreux du XXème siècle. Personnage gênant pour ses multiples origines et ses convictions politiques et morales qui brisent les prisons culturelles. Depuis lors, les identités ne cessent de nous meurtrir. Les hommes continuent à s’enfermer dans les carcans de l’inhumanité, à provoquer leur propre malheur. Dieu nous a créé différents pour que l’on se reconnaisse « mutuellement ». C’est cela le mystère de la différence. L’assassinat d’Henri Curiel est la partie honteuse à cacher. Le monde ne peut accepter que l’on soit juif et pro-palestinien et militant communiste anticolonialiste. C’est trop pour les politiciens criminels adeptes de la mise au pas, des partisans religieux qui n’ont rien compris des finalités spirituels et des hommes tout court qui, aujourd’hui pratiquent l’intolérance politique, une catégorie de la haine de l’autre qui n’est pas suffisamment documentée parce que le monde entier végète sous la botte de la dictature des cercles de la haine. L’on est du bon coté des choses parce qu’appartenant à tel courant politique ou autre, telle religion ou autre. La bonté n’a pas de religion. L’on est bon et c’est tout. La religion ultime est la soumission…à la Vérité.

Henri Curiel est né le 13 Septembre 1914 en Egypte pays cosmopolite, terre de tous les mystères, des origines culturelles, de l’ouverture par essence, du mélange de sang. L’Egypte est presque créole malgré l’arabité dominante, c’est le pays du tout où il ya tout ce que vous voulez. Henri Curiel a choisi la nationalité égyptienne même s’il n’a jamais vraiment maitrisé la langue d’Abul Aswad Aduwayli. Il est le père d’Alain Gresh, le fameux éditorialiste du fameux Monde diplomatique. C’est donc dire que le militantisme est peut-être de l’ordre de la transmission dans cette famille. Seulement le père d’Henri, un banquier bien établi a toujours voulu que son fils se destine à la finance. Mais rien n’y fit, Henri Curiel est pris par la fièvre militante de l’époque, ses lectures l’inclinent fortement vers le Marxisme (la plus grande religion séculaire de l’époque). Et comment pouvait-il être indifférent à la cause palestinienne malgré sa judéité ? Beaucoup de défenseurs de la cause palestinienne des années 70 aux années 80 ont été forgés dans cette idée par les partis et mouvements de gauche. Au Sénégal des journées-Palestine étaient organisés par les mouvements de gauche et la plupart des étudiants de l’époque à qui il n’était pas donné la possibilité de s’inscrire dans les facultés de l’Université de Dakar étaient dénommés « Les palestiniens » et ils en étaient fiers. Ils venaient suivre tranquillement les cours sans possibilité de passer les examens et bénéficiaient de cet aura poétique que confèrent les situations de déshérités en ces temps où le militantisme gardait son romantisme indispensable. C’est donc dire que le sentiment d’une injustice inqualifiable était ressenti partout chez des esprits libres et même des intellectuels d’ethnie juive. Mais Henri était du juste milieu quant au conflit israélo-palestinien.

Au reste il est sans nul doute l’une des figures importantes de l’Indépendance égyptienne du joug colonial britannique. Plusieurs fois emprisonné pour des faits de sédition son « Mouvement égyptien de libération nationale » fondé en 1943 en pleine guerre mondiale, a joué un rôle de premier plan pour le départ des Britanniques. Opposant irréductible au Roi Farouk, il fut capturé et embastillé par la suite avant d’être expulsé en France et déchu de la nationalité égyptienne. Henri Curiel fut un communiste adepte de l’internationalisme libre. Partout où il se rend, il est en contact avec  les militants et tente de les organiser. Mais ce résistant à la colonisation et l’occupation Nazi qui a soutenu De Gaulle contre le Maréchal Pétain n’a pas un tempérament à se soumettre au centralisme fut-il dénommé « démocratique » comme la rhétorique communiste le faisait à l’époque. Son indépendance intellectuelle l’éloigne du Parti communiste. Pour lui il n’ya que la justice qui vaille. Plus tard il soutiendra le « Mouvement des officiers libres » dirigé par Gamal Abdel Nasser qui a renversé le roi Farouk. « Solidarité » une solide organisation qu’il fonda permis à plusieurs mouvements de libération du monde comme l’ANC de former leurs militants.

Mais son rôle de médiateur dans le conflit israélo-palestinien est certainement l’un des plus importants. Il croyait à la Paix et au rapprochement des pacifistes des deux camps. Mais ce 14 Mai 1978 il avait rendez vous avec le destin. Sorti pour aller à son cours de Yoga, deux hommes l’attendaient qui tirèrent à bout portant sur lui. Il s’écroula, mort comme un militant nom pas la Kalachnikov à la main mais les idées et l’action chevillées au corps. Mais qui a assassiné Henri Curiel ? Les partisans de l’Algérie française à qui il s’opposait ? Une action des services secrets français ? En 2015 René Resciniti de Says un activiste de l’extrême droite de l’époque revendique l’assassinat d’Henri Curiel dans ses Mémoires. La justice française fut obligée de rouvrir le dossier Henri Curiel dont la vie ne cessera d’inspirer et d’intriguer tous ceux qui aujourd’hui tentent d’améliorer le monde selon une justice équitable. LA LUTTE CONTINUE !
Khalifa Touré






 

samedi 9 juin 2018

Idrissa Seck est-il si cultivé qu'il le prétend?







C’était il ya sept ans nous écrivions ceci : « Quant au  tonitruant Idrissa Seck, cet homme attire par son extrême éloquence qui ne dénote pas forcément une grande culture littéraire. Il a certainement lu par ci et par là. Mais il suffit de l’entendre dire devant le journaliste Abdou Latif Coulibaly « Périclès a dit » pour savoir qu’il n’est pas un grand lecteur. Il devrait dire « le Périclès de Thucydide a dit » par exemple. Par ailleurs lorsqu’il a cité Hamlet dans l’une de ses nombreuses sorties médiatiques, des jeunes étudiants se sont empressés d’aller chercher un écrivain qui s’appelle Hamlet. Ils ne savaient pas (les pauvres !) que Hamlet est un personnage de Shakespeare. Pour soldes de tout compte Idrissa Seck a une réputation surfaite mais « culturellement » il vaut mieux que bien des politiciens, même si l’on sait que se mesurer à la médiocrité n’est pas une ambition. 
Des auditeurs avertis parmi nos amis ont affirmé d’ailleurs, qu’il n’a pas lu  Hamlet de Shakespeare sinon il ne l’aurait pas cité dans un tel contexte. Hamlet qui ne maitrise pas son destin et qui croule sous le poids des forces qui l’accablent  ne  saurait être une référence en politique. Depuis Nicholas Machiavel on sait que la politique est l’art de contraindre la Fortune par la Vertu. La citation de Hamlet est peut-être « lapsus linguae » qui révèle une forte imprécision entre la fortune et la vertu chez l’homme. Idrissa Seck est-il un homme qui croit à la vertu de la nature ou à la fortune des événements ? La lecture dans Plutarque des vies de Nicias qui se cachait derrière la fortune et Sylla qui mettait toujours la fortune en avant l’aiderait peut-être à comprendre et à  se déterminer. » Tel est le passage que nous avions consacré à Idrissa Seck, il ya bien des années dans notre texte intitulé « Mais que lisent les hommes politiques ? ».

L’erreur parmi tant d’autres aujourd’hui est de dissocier la face politicienne de l’homme Idrissa Seck de  son parcours social, sa personne,  et ses graves dérapages sur le caractère sacré et coraniquement fondé de la Kaaba comme direction pour l’Umma Islamique et lieu de pèlerinage. Dans nos pays francophones la légèreté pousse traditionnellement à négliger le profil des hommes politiques, l’idiosyncrasie des hommes publics, leurs forces, leurs faiblesses. Qui est l’homme ? Qu’est ce qu’il a fait comme études ? Il ne suffit pas de dire je suis sorti de Princeton en trainant une voix nasillarde « outre- atlantiquement » empruntée, même si ces affabulations marchent au Sénégal. Personne ne sait si Idrissa Seck est Juriste, économiste, littéraire ou philosophe. Du moins personne ne va vérifier, tellement il est devenu impensable que cet homme traine une réputation surfaite. Idrissa Seck n’est pas un homme sûr et  transparent. Il préfère l’intelligence au travail, à la culture et à la lecture profonde. C’est un homme de parade et de surface. Et c’est dommage !

Cette terrible complaisance nous a souvent emmenés à des  déceptions et surprises que l’on vient de noter ces derniers jours. Qui n’a pas approuvé ses citations coraniques intempestives et impertinentes, surtout parmi ceux qui lui jettent la pierre aujourd’hui ? Les musulmans Sénégalais aiment tellement l’Islam qu’ils sont même prêts à se  laisser tromper au nom de leur religion. Lorsque dans une querelle avec Me Ousmane Ngom il a renvoyé les gens à un verset du coran pour insinuer que l’homme est né hors mariage, ce qui est faux, les Ulémas Sénégalais qui seuls peuvent « décortiquer » cette injure blasphématoire drapée de versets coraniques n’ont pas réagi. Il avait vent en poupe. Lorsqu’il a comparé la victoire d’Abdoulaye Wade (sa victoire ) à Fath Makka le retour victorieux du prophète Mohamed(PSL) à la Mecque, personne n’a relevé la comparaison grossière et  impolie. S’il était un homme qui écoute,  il aurait su qu’à un moment donné les Sénégalais musulmans désemparés anti-laïcité étaient prêts à lui offrir une sorte de  délégation sentimentale. Voilà qui explique même tant de tolérance vis-à-vis de ses dérapages verbaux. Idrissa  ignore notamment la hiérarchie sentimentale des musulmans sénégalais  chez qui, les Chefs confrériques,  la Kaaba, la Mecque et la figure du Prophète (PSL) trônent au dessus de tout. Au Sénégal on ne s’amuse pas avec ça !

Mais Idrissa Seck vient de franchir le Rubicon au propre comme au figuré. Cette sortie malencontreuse et  gravissime du point de vue du dogme musulman est loin d’être anecdotique. Il a touché le dogme musulman expressément, qu’il s’attende donc à des réponses dogmatiques. Et les analystes qui disent qu’il a  marqué des points en marketing politique en réussissant à faire parler de lui partout dans le monde sont d’une banalité et d’une méprise incroyables. Ceux qui avancent cette idée qui relève du truisme scolaire et banal d’apprentis politologues ont tout faux. Ils sous-estiment la force et la capacité de réaction du groupe musulman. Ils ne savent absolument rien de la diplomatie du monde musulman.  La plupart de ces analystes et Idrissa Seck lui-même  pensent certainement que la Umma ne peut pas faire et défaire et qu’il vaut mieux aller avec le groupe sioniste. Ils se fourrent le doigt dans l’œil et c’est ce que le sieur Idrissa Seck vient de  faire. Le  3 Juillet 2011 dans un texte intitulé  « Idrissa Seck ou la maladresse des habiles » nous écrivions la chose suivante : « Il est des hommes qui cherchent tellement l’habileté et la ruse qu’ils en deviennent maladroits et presque tortueux. L’homme politique Thiessois, Idrissa Seck, appartient peut être à cette catégorie. » Et  il vient de le démontrer à ses risques et périls en s’attaquant  à la lettre du Coran que voilà :  
« La première maison qui ait été édifiée pour les gens, c’est celle de Bakka (La Mecque) bénie et une bonne direction pour l’univers. Là se trouvent des signes évidents, parmi lesquels l’endroit où Ibrahim s’est tenu (Maqama Ibrahim) ; et quiconque y entre est en sécurité. Et c’est un devoir envers Allah pour les gens qui ont les moyens, d’aller faire le pèlerinage de la Maison. Et quiconque ne croit pas… Allah se passe largement des mondes » Sourate Ali Imran versets 96/97

Voici le verset(96) cité et tronqué par Idrissa Seck ! Tronqué parce que le monsieur  n’est pas allé au bout de la citation en omettant volontairement(ou pas) la suite du texte dont le contenu sémantique est un prolongement et une explication sous forme de précision géographique et juridique du lieu nommé Bakka qui est sans aucun doute un homonyme de Makka. Il ne suffit même pas d’être arabophone pour savoir que les formes « B » et « M » sont interchangeables parce qu’ils sont bilabiales. C’est comme les labiodentales  « V » à la place du « F » des lecteurs de coran mauritaniens de langue Hassanya bien connu de tous. Mais tout cela est compliqué peut-être. Vous aurez simplement remarqué que le passage qu’il cite lui-même le condamne sans appel : «Là se trouvent des signes évidents, parmi lesquels l’endroit où Ibrahim s’est tenu (Maqama Ibrahim)" et plus loin (...)Et quiconque ne croit pas… Allah se passe largement des mondes  ». Il n’ya pas à chercher loin, la réplique se trouve dans le passage qu’il cite.  Apparemment Idrissa Seck ne se contente pas de l’évidence en Religion. S’il préfère le doute, il n’a qu’à se débarrasser de sa paresse intellectuelle et affronter l’immense espace du doute, de la réflexion et même de la spéculation qu'autorise l’Islam appelé Ijtihad et qui a donné en partie toutes les écoles juridiques connues. Point d'Ijtihad en matière de dogme où  la règle est la prescription et l'autorisation textuelle alors que dans l'espace des pratiques communes c'est le principe de la permission originelle qui fonctionne, la règle étant la permission et l'interdiction étant l'exception. Il n’ya aucun système qu’il soit juridique, politique, religieux où la réflexion n’obéit pas à une tradition, des règles et des méthodes. Même en philosophie la spéculation n’est pas vide, elle n’est pas aussi libre qu’on le dit. Elle obéit à des systèmes, traditions et écoles philosophiques. Toutes les interprétations sont normées et savantes. La philosophie est un métier comme la théologie. Bref, Idrissa Seck ne sait rien de ce qu’il dit ! Comment peut-on penser que lui qui ne connait pas la langue arabe peut contredire un Imam de la Mecque qui est un savant diplômé des grandes universités ? Soyons sérieux ! Il existe des milliers de mots dans sa langue maternelle, le Wolof,  dont-il ignore totalement l’évolution sémantique. Le français n’en parlons-pas ! Ce n’est pas du tout sa spécialité. La simple modestie et la peur de la gloriole auraient pu sauver le bonhomme. Mais à force de se gargariser de culture et de science qui n’existent que dans les formules mielleuses on tombe très bas !

Où se trouve Maqama Ibrahim si n’est à la Mecque près de la Kabba ?  Où se trouvent les lieux Safaa et M’arma nommément cités dans le Coran, si ce n’est dans le lieu de pèlerinage que le sieur Idrissa Seck a remis explicitement en cause en disant avec une désinvolture inqualifiable que Bakka signifie « pleurs » et que le lieu indiqué par Dieu est ailleurs et qu’il va le révéler. On attend la grande révélation d’Idrissa Seck ! Ses plates excuses qui sont feintes et teintées d’ironie et de menaces ne suffisent pas. Lisez le verset 158 sourate Baqara : « Asafa et Al Mawah sont vraiment parmi les lieux sacrés d’Allah. Donc, quiconque fait le pèlerinage à la Maison ou fait l’Umra ne commet pas de péché en faisant le va-et-vient entre ces deux monts. Et quiconque fait de son propre gré une bonne œuvre, alors Allah est Reconnaissant, Omniscient »
Quand il affirme que Makka n’a pas été cité par le Coran tout en sachant qu’il l’est à la Sourate Al Fath qui vient avant la Sourate Ali Imran dans le processus d’apprentissage du Coran, la chose est très claire. Idrissa Seck reprend mots pour mots les thèses farfelues que personne ne prend au sérieux de Dan Gibson qui s’est choisi pour spécialisation la discréditation de l’Islam.

C’est alors que les sceptiques tapis dans l’ombre se sont engouffrés insidieusement dans le débat insinuant intolérance, refus de débat ou autres formules déblatérées par des intellectuels qui ne prennent même pas le temps de lire le texte du Coran, ne serait-ce que pour s’informer et qui ignorent royalement l’histoire de Idées en Islam. L’Islam, les confréries et les daaras sont pour eux des formes éculées. J’en connais qui ont étudié jusqu’au doctorat et qui n’ont jamais fait de Logique, de Rhétorique, de Lexicologie, de philosophie du Droit, de Métrique et d’Astronomie enseignées dans les daaras. Il n’ya aucun « oustaze » qualifié et digne de ce nom qui enseigne le Fiq aujourd’hui et qui n’a pas étudié la Logique (Al Mantiq), c’est indissociable. Alors nous autres « intellectuels » prétentieux remballons nos grands airs et continuons à chercher, à lire sérieusement. L’Averroès tiré de « Phares » de Jacques Attali qu’il reprend  souvent sans le nommer n’est personne d’autre qu’Ibn Rouchd l’éminent juriste Malikite enseigné dans tous les daaras de ce pays à travers son ouvrage « Bidayatoul Moujtahid Wa Nihayatoul Mouqtacid. Mais il est plus proche d’Attali qui est la clé principale de « l’Affaire Idrissa Seck ». 

Idrissa Seck a failli créer un clash confrérique,  mais tous ceux qui ont  dérapé sur ce sujet manquent de jugement et de clairvoyance. Ils ne savent pas que c’est en ce même lieu Bakka-Makka que Serigne Cheikh Mbacké Gaindé Fatma et El Hadji Abdou Aziz Sy Dabagh ont effectué ensemble le pèlerinage en prenant le même bateau. C’est ici qu’El Hadji Oumar Tall, Mame Maodo Malick Sy , Mame Abdoulaye Niasse et plus tard Cheikh Tourad Aidara Ould Abass, Serigne Fallou Mbacké, Mame Cheikh Anta Mbacké,  El Hadji Mansour Sy Maodo ont fait le Hadji. C’est là à Bakka-Makka que Baye Niasse a fait ses nombreux pèlerinages. Idrissa Seck peut-il en savoir plus qu’eux ?
Indépendamment de ce sujet regrettable, ces mémorables pèlerinages seront l’objet de la prochaine chronique. InchAllah!

Khalifa Touré