« Tout le rêve de la
démocratie est d’élever le prolétaire au niveau de bêtise du
bourgeois » Gustave Flaubert
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Toute culture politique vient forcément de loin, animée qu’elle est, par les soubresauts de l’histoire et de la civilisation. C’est une sédimentation successive. Elle est souvent informée par les traditions religieuses, la vie des grands hommes et les doctrines politiques qu’ils incarnent, qu’elles soient ou non théorisées. En vérité il ya peu d’événements dans la marche de l’humanité.
En histoire un événement est un phénomène comparable à la disparition des dinosaures il ya 65
millions d’années, le reste est une simple succession de faits historiques. La
loi historique de l’apogée et du périgée est souvent contredite par les
prophètes et leurs successeurs les hommes qui font l’histoire. Leur apparition vient
casser de façon inattendue l’arrogance des systèmes dominants sans respecter
aucune forme de processus. L’apparition de Jésus a fait tomber Rome plein de
morgue et de gloriole, en dépit du mouillement des mains de Ponce Pilate
trempées dans l’eau. Le ponce-pilatisme est ainsi né qui influencera bien des
politiciens à travers les siècles. La politique politicienne s’est faite contre
Jésus figurez-vous !
Mais les sous-systèmes artificiels d’aujourd’hui comme la
Finance, la Démocratie, la République et la bonne gouvernance sont d’une
fragilité telle que la simple organisation intelligente animée par le ras-le-bol,
la colère et la déception des peuples viendra à bout de tout, toutes les
contre-vérités des communistes, les billevesées des socialistes, les histoires
à dormir chantées par les rossignols du libéralisme sauvage. Personne n’a le
monopole du cœur, mais le cœur bas là où se trouve la vérité. Les choses ont
changé depuis bientôt vingt ans et les élites sont les seules à ne pas voir ces
choses telles qu’elles se présentent. Quoi de plus hallucinant, de plus
changeant et de plus « révolutionnaire » pour cette France gérontocratique
à la tradition politique radicalement partisane, au système étatique jacobin,
envoyer à la présidence un jeune homme de trente neuf ans ? Mais c’est
louche tout cela ! un lièvre dort quelque part tapis sous le plan. Il ya matière
à réfléchir quand on sait qu’il ya des changements dont le but est d’empêcher
la révolution.
Quant à Marine Le Pen, elle est une possibilité depuis
longtemps. Sa victoire ni sa défaite ne sauraient être une surprise. Le
changement est là il est dans les mœurs sociaux, politiques et religieux. Il
suffit de simplifier pour se faire bonne conscience et se parer des
traditionnelles formules stigmatisantes pour dire que toutes les forces
réactionnaires de la France ont voté pour Emmanuel Macron. C’est quoi la
réaction ? « Vérité en deçà des Pyrénées erreur au-delà ». Le Parti Socialiste
français devrait se dissoudre dans le plus chaud des dissolvants pour
régénérer. Mais il ne le fera pas. Les socialistes ont hérité des communistes
le sentiment « religieux » de l’infaillibilité. Il faut être
socialiste pour présenter un Benoit Hamon à la présidentielle. Quant à Emmanuel
Macron, s’il passe il sera l’homme à abattre parce que l’on saura qui est
l’homme. Il fera fort à faire face à Mediapart et les nombreux lambertistes en
France et bien d’autres grands indépendants qui ont compris. Figurez-vous !
son éminence grise Jacques Attali est un adepte du gouvernement mondialisé. Le débat que Macron a rudement mené contre Marine Le pen nous a
montré un jeune plein d’assurance trop d’assurance qui rappelle quelque part
Nicholas Sarkozy mais une Marine Le pen très faible en débat télévisé. Les
analystes politiques français ont conclu à un débat sans grande hauteur. Mais
peut-on avoir mieux, en France, par les temps qui courent ? Du reste ce que
nous avons remarqué c’est la faiblesse du l’analyse politique en France surtout
sur France 24. C’était ahurissant ! Le débat n’a pas volé haut mais
l’analyse politique est restée en rase motte. Lors de la défaite de Lionel
Jospin au premier tour et l’arrivée de Jean Marie Le pen au second, nous avons
eu droit partout à des analyses les plus pointus même sur Paris-Match avec le
brillant Alain Genestar. Le plus étincelant est sans nul doute « La faute
à Calvin, Trotski et Derrida » terrible article de Marc Labron dans LE
POINT.
Mais ce qui plait en
politique c’est la guerre, paradoxalement. Elle cesse d’être politique lorsqu’elle
n’est plus une guerre idéologique tranchante, sanglante et légale. La politique
est le dernier vestige de nos valeurs guerrières, le champ de bataille où
viennent tomber les âmes aspirées par de grandes choses. C’est aussi le terrain
des âmes damnées. Emmanuel Macron a-t-il l’instinct de tuer ou fait-il
semblant ? Personne ne sait. En tous cas Marine Le pen est une tueuse née.
Elle a crucifié son père.
Au reste la politique française est
indéniablement influencée par sa grande culture littéraire qui explique cette
propension chez les hommes politiques français à écrire des livres. Emmanuel Macron, Marine Le pen, François
Fillon et le très cultivé Jean Luc Mélenchon ont peut-être ou à coup sûr lu le
fameux « Madame Bovary. » C’est dans les lieux communs de la culture
littéraire surtout française d’avoir connaissance du grand maître du réalisme.
Mais peu ont lu ou apprécié à sa juste valeur « L’éducation
sentimentale » qui n’est pas que sentimentale mais un chef d’œuvre de l’éducation
politique. Gustave Flaubert, Victor Hugo et Honoré de Balzac sont des penseurs
politiques au sens littéraire du mot. Mais
la grande catastrophe culturelle en France c’est d’avoir préféré Descartes à
Pascal malgré « Les méditations métaphysiques ». Une autre affaire !
La question de l’herméneutique politique, l’interprétation
des faits politiques à la lumière de l’histoire se posent aujourd’hui. Le
niveau le plus élevé de l’interprétation est la prédiction, mais aussi étrange
que cela puisse être, pour « un voyant-clairvoyant » l’avenir et le
présent ne font qu’un, rien ne vaut le moment ultime de la vision. Même la
bonne vieille méthode du recul ne marche plus, puisque ce n’est plus une
méthode mais une simple attitude. C’est toujours une formule qui gagne et cette
« formule chimique du bonheur » qui a fait gagner Macron (au premier
tour !) est l’occupation idéologique et formelle du vide laissé par le
centre. On gouverne toujours par le centre ! Quand est ce que les
candidats aux présidentiels le reconnaitront ? Des hommes comme Jacques
Attali et autres l’ont soufflé à Macron. Il ya certainement un puissant
mouvement d’intellectuels derrière tout cela. La gauche qui a une grande
tradition d’intelligence (au sens de stratégie et de renseignements) est
paradoxalement inapte à comprendre ce phénomène. Un homme qui gagne cela s’invente
et des groupes « intelligents » ont su présenter Emmanuel Macron à un
moment où la formule anti-establishment fait partout mouche même au Venezuela
et aux USA.
Emmanuel Macron n’est certainement pas un socialiste à la
manière de Jean Jaurès, mais ce dernier serait suffisamment philosophe pour
mieux comprendre aujourd’hui « La réalité du monde sensible »
Khalifa Touré
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