Après « l’éloge de la folie » à la manière d’Erasme
de Rotterdam, c’est alors qu’avancèrent les fous les plus furieux que le monde
ait connus. Les professeurs, les vrais, sous leurs lourdes toges officiant
ex-cathedra une science que les pauvres carabins n’arrivent pas à saisir par
des méninges non pas fatiguées mais déjà habituées à autres choses. Ces choses
de l’inculture et de la vulgarité qui provoquent la méningite intellectuelle.
Les cerveaux ramollis
et chloroformés par les ambiances nocturnes qui manquent de poésie. Ils
manquent de cet oxygène appelé « culture », qui les presse jusqu'à
l’étouffement. Pauvres étudiants, bientôt ils ne seront bons que pour les flots
moutonnants de la mer à côté
de « Cheikh Anta Diop ». Faut il brûler l‘université sénégalaise ?
Jeter les étudiants à la mer ? Beaucoup
d’entre eux ne savent pas nager. Ils vont couler comme pierre à l‘eau « profonde »
préférant glouglouter dans l‘eau salée à la poursuite d’une naïade aux seins
nus, que de se noyer dans
les eaux spirituelles de William Butler Yeats, Dimitri Mendeleïev ou Léon
Walras. Les plus sérieux répondent aux appels des belles sirènes. Le romantisme
est passé par là ! Plus tard ils se marieront peut être avec les filles
qui ont su rester chastes.
Ils en ont marre de la théorie mathématique des fractales ces
étudiants, la grammaire générative et transformationnelle de Noam Chomsky les
rebute, les cérébrales tentatives de Ludwig
Wittgenstein avec son assommant Tractatus
logico-philosophicus les font fuir à toutes jambes. « Toutes ces
choses ne sont pas faites pour
nous, c’est des trucs de blancs » m’a dit un jour une étudiante. « Des
billevesées de bourgeois »,
dira un crétin qui se prend pour un communiste. N’est pas communiste qui
veut ! Décidément la chronique de la folie et des sottises humaines est plus longue que prévue. Foutue « démocratie » !
elle a
sanctifié les pires gredins que
la terre ait portés.
Quant aux professeurs ils ne portent pas la barbe comme les savants, ils
sont tous rasés de près. Le syndrome du bouc est passé par là. Mieux vaut ne
pas ressembler à ce mâle de la chèvre dont la réputation de lubricité est loin
de la sagesse de la barbe qu’il porte dans toutes ses saillies. " Les Stoïciens ont la prétention de voisiner avec les dieux.
Qu'on m'en donne un qui soit trois ou quatre fois, mettons mille fois stoïcien;
peut-être, dans le cas qui nous occupe, ne coupera-t-il pas sa barbe, emblème
de sagesse qu'il partage avec le bouc » a écrit l’humaniste hollandais du XVIème
siècle. Mais peu s’en faut que le noble savoir glisse sur la peau lisse et se
brise les pattes.
Décidément l’ambiguïté n’est pas seulement une aventure, sa
présence obsessionnelle dans les symboles se joue de notre perverse habitude
d’analyste et de chroniqueur à tout interpréter. Il n’ya pas plus ambigus que
les prédicateurs religieux et ultra-médiatiques. La majorité n’a pas le niveau
du brevet en sciences islamiques. Un jeune quidam qui ignore totalement le
Nassikh Wal Mansoukh (l’abrogeant et l’abrogé) se permet de faire le « Tafsir »
à une Télé privée bien connue. Le plus prisé des « Oustaze »
médiatiques sénégalais ne parle presque pas l’arabe. Si ces énergumènes qui
pratiquent l’islamo-business ne sont pas « fous », la folie n’existe
pas en ce pays des plus grands lettrés en langue arabe : Serigne Cheikh
Tidiane Sy, Mame Khalifa Niass, Cheikh Tidiane Gaye. L’une des sommités
mondiales des sciences coraniques est sénégalais, il s’appelle Muhammad Al
Hassan Bousso.
Que dire des chroniqueurs d’aujourd’hui, cette race d’écrivains
désemparés, auréolés d’une vraie, parfois surfaite réputation de scribe à la plume fine et tranchante
plutôt que lucide. « Les chroniques italiennes » de Stendhal sont
passées par là donnant au genre une once de noblesse. Guy de Maupassant un fou,
un vrai, mort de syphilis, d’amour et de démence a écrit près de mille
chroniques dans les journaux Gil Blas et Le Gaulois pendant dix ans. Ecrire des
chroniques pendant dix ans ! Il ne faut surtout pas le faire ici. C’est de
la folie ! Les plus mauvais livres sont quand même des livres, même si
personne ne les lit. Le chroniqueur a l’avantage d’être lu. Le mauvais écrivain
a l’avantage d’être un auteur qui provoque la pitié en demandant qu’on le lise.
Quel avantage malheureux ! « Lisez-moi s’il vous plait, il ya au
moins une bonne phrase dans mon bouquin. » Il faut être fou pour écrire. De
grands penseurs n’ont rien écrit, ils ont préféré penser et parler. Ils ne sont
pas fous ! La graphomanie, cette manie à écrire à tout va, n’était pas encore inventée.
Avancent alors, les « gens saignants » des écoles que
personne n’ose critiquer. Ils saignent de partout parce qu’ils font saigner l’enseignement
tout de même et malgré tout. Ils ont le malheur de professer sans chaire, au
bas de la chaire même. Un peu de carriérisme, une thèse, doctorale ou non et
quelques articles les feront monter à cette chaire tant convoitée. Donnez aux
« gens saignants » ce qu’ils demandent et qu’on en finisse!
Quant aux journalistes
ils ne sont plus mal fagotés comme à l‘époque de ce fameux « débraillé
travaillé » qui donnait un profil inquiétant et mystérieux à ces hommes et
femmes qui sentaient la grande culture, le tabac, l‘eau de Cologne et…
l’eau de vie parfois. D’autres types
suivront, et même des prototypes qui viendront peupler notre regard. Alors
suivra le temps où seront nettoyées les écuries d’Augias « le fou ».
Khalifa Touré
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