Qui va arrêter Yaya
Jammeh ? Personne ne sait. Yaya Jammeh serait-il un homme
indéboulonnable ? Certainement que oui pour les superstitieux
inguérissables, les partisans du
jugement facile et enfin ceux parmi les sénégalais qui jouent à on ne sait à
quel jeu. Imprudemment et croyant être béni du diable, il vient d’organiser des
élections qu’il a perdu devant un parfait inconnu : Adama Barrow, un homme
inexpérimenté qui demande à être soutenu, encadré gratuitement par devoir,
amitié et hospitalité.
On ne le dit pas assez, puisque c’est une honte, Yaya Jammeh a bénéficié de soutiens au
Sénégal, dans l’opinion, dans la bouche pleine de certains analystes
politiques, des artistes et des sportifs qui s’en vont faire leur cour à Banjul. C’est connu, qu’il s’agisse de Laurent
Gbagbo, de Dadis Camara ou de Yaya Jammeh, des mercenaires accoutumés au soutien
intellectuel et médiatique ont été activés. Yaya Jammeh a distribué de
l’argent. Ah que le monde a changé ! Quand je pense que la cantatrice
Sénégalaise Khar Mbaye Madiaga a refusé à l’époque d’aller se produire devant
le dictateur de Bangui Jean Bedel Bokassa.
« Il nous faut un homme comme Yaya Jammeh »
entend-on souvent dire dans la rue. C’est important la rue ! Elle est
peuplée d’électeurs non négligeables qui fantasment et ergotent sur un ordre à
venir, un messie en treillis qui va sauver notre pays, nous débarrasser de
cette démocratie inutile. Dans un pays où
la parole se transforme en flot déferlant , péroraison, caquètement et
parfois braiement à vous tuer l’âme, il est loisible de dire des âneries quand
on a jamais mis les pieds dans la prison de Mana Konko, le mouroir de Yaya
Jammeh, le bagne de Taoudéni au Mali où
Moussa Traoré a envoyé l’écrivain Ibrahima Ly (lisez « Toile
d’araignée »), la prison de Oualata en Mauritanie qui a tué l’écrivain Ten
Youssouf Gueye et le sinistre Camp Boiro en Guinée où périt de diète noire
Diallo Telli. Quand on n’a pas de problème, on cherche des problèmes. A force
de vivre dans l’ordre on rêve de goûter
au désordre. C’est du tourisme imbécile ! Une sorte d’exotisme mortel.
S’il ya plus de justice, de liberté et de respect des droits
humains en Gambie qu’au Sénégal, de foi et de prospérité économique dans ce
pays qui n’appartient pas à Yaya Jammeh ils n’ont qu’à renoncer à la
nationalité du pays de Blaise Diagne, Lamine Gueye, Ngalandou Diouf, Mamadou
Dia, Valdiodio Ndiaye et Léopold Sédar Senghor , le pays du grand Khaly
Ammar Fall, Thierno Souleymane Baal, El Hadji Oumar Tall Al Foutihou, Cheikh El
Hadji Ibrahima Niasse et Cheikh Moussa Kamara. Il est difficile d’écrire un
texte patriotique en ce pays. Le chauvinisme grand-Ouolof est ailleurs, dans
les gestes, les manières mais non dans la littérature. Il ne nous servira à rien lors d’une grande confrontation. Quand
il s’agit de foncer on commence à invoquer une molle doctrine diplomatique, à
jouer au raffiné partisan de l’observation inutile. L’essence de la Realpolitik en diplomatie n’appartient pas à
Bismarck, elle a existé bien avant lui, même s’il en est le
porte-flambeau. Avec Yaya Jammeh il n’ya
que la Realpolitik qui vaille aujourd’hui, c’est-à-dire la diplomatie de la
force contraignante.
Ceux qui regrettent Jammeh n’ont qu’à s’exiler en Gambie et
confier leurs litiges à des juges nigérians, ghanéens et libériens, loués et
achetés par Yaya Jammeh pour prononcer ses sentences macabres contre les
opposants. Yaya Jammeh est une honte pour la commission africaine des droits de
l’homme mais surtout pour les intellectuels africains, la gauche africaine. On
l’a laissé trop faire. La Gambie n’intéresse personne sauf quelques organisations
occidentalisées qui aujourd’hui se pourlèchent les babines croyant que la
Gambie est maintenant prenable. Les nouvelles autorités devront faire gaffe. Il
ne faudra pas qu’ils jettent le bébé avec l’eau du bain. Après Jammeh ils vont
se jeter sur la Gambie comme des rapaces. Un défi immense pour Barrow :
Eviter le désordre et le chaos après la libération mais élaborer une diplomatie africaine et nationale. Le glas a déjà sonné mais il ne l’entend pas
le sourd! Les gambiens adorent les sénégalais, mais Yaya Jammeh déteste le
Sénégal !
Yaya Jammeh serait même un ami de Dieu, un marabout détenteur
de pouvoirs mystiques, un panafricaniste. Yaya Jammeh panafricaniste ? Ce
monde n’est pas sérieux ! Tous les grands
combats, les nobles causes pour la restauration de la dignité humaine
sont parasités par de grands enfants qui déblatèrent des choses qu’ils
ignorent, des opportunistes guidés par l’argent et des comploteurs à la solde
qui savent ce qu’ils font et sont prêts à toutes les manipulations pour
alimenter leur combat d’arrière-garde. Personne n’ose leur dire
« taisez-vous !» Tous les souteneurs se sont rangés aujourd’hui parce que l’homme est
fini.
Yaya Jammeh est un panafricaniste pour ces jeunes et vieux
qui n’ont aucune envergure. Un panafricaniste est aujourd’hui un africain qui a
l’injure anti-occidentale à la bouche. C’est trop simple, trop facile et même
écœurant. C’est à vomir si on écoute ces manières puériles de défendre
l’Afrique. Il y en a même qui verse dans le racisme anti-arabe. Les groupes qui
les abritent ne s’intéressent même pas à leur orientation idéologique, il leur
suffit d’entendre quelqu’un qui a le toupet de dire que l’occident est le mal
absolu et c’est tout. Voilà la définition actuelle du panafricanisme qui fut
naguère éminemment politique et scientifique pour des hommes valeureux comme Marien
Ngouabi. Il faut une forte préparation morale pour défendre l’Afrique. Sinon on
risque de tomber dans la sensiblerie panafricaniste. Entre-temps Yaya Jammeh a
tenté de supprimer tous les gambiens. Mais il a échoué. Il aurait pu
tranquillement se retirer, mais il serait trop beau pour être vrai cette fin trop facile de Yaya Jammeh. Il en a trop fait pour
partir impunément. Il va payer d’une manière où d’une autre!
Khalifa Touré
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