mardi 7 mars 2017

Pourquoi le débat politique est-il si faible ? (suite et fin)


« Tous, ils m'apparaissent des fous, des singes qui grimpent, des surexcités. Leur idole sent mauvais, ce monstre froid : tous tant qu'ils sont, ils sentent mauvais, ces idolâtres.
Mes frères, voulez-vous donc étouffer dans les émanations de leurs gueules et de leurs appétits ? Brisez plutôt les fenêtres et sautez dehors, à l'air libre.
Ecartez-vous donc de la mauvaise odeur. Fuyez l'idolâtrie des superflus !
Ecartez-vous donc de la mauvaise odeur ! Fuyez donc les vapeurs de ces sacrifices humains ! »
Ainsi parla Zarathoustra,  Friedrich Nietzsche 

Terribles paroles prophétiques de Zarathoustra ce mage venu d’Orient. Appliquées comme il sied aux hommes politiques de notre période décadente ils deviennent des fous, des singes et des surexcités qui marmonnent et parfois vocifèrent des paroles insensées. La camisole de force est là pour leur rendre un peu de dignité. Leurs cris d’orfraie n’y feront rien. Tout le monde a entendu et vite oublié le cri soudain et subit d’un homme politique sénégalais  en pleine campagne électorale. Un moment de folie passagère. Personne n’a eu le courage de lui exiger un bulletin de santé mentale. Il l’a échappé belle ce possédé parmi tant d’autres dans la classe politique. Il a échappé à la stigmatisation tellement la chose était grosse et moche. C’est cela qui tient lieu de débat politique aujourd’hui : La transe, la folie, le mimétisme, la mimique, les singeries,  les propos loufoques et incompréhensibles comme des incantations mystiques. Tout le monde se souvient de la fameuse audience que le président Abdoulaye Wade a accordé à un homme politique proche d’Idrissa Seck en disgrâce. L’homme en question a tenu ces propos d’un ridicule assumé du genre: « Cette audience est importante et puisqu’elle est importante, le dévoilement de son contenu ne peut être fait que selon un jour certain qui viendra certainement puisque c’est le futur ». Du galimatias politique en quelque sorte! Nous en avions ri à gorge déployée. Les politiciens ont la manie de faire valoir une habileté « téléphonée » tellement grossière qu’elle devient maladroite. C’est la fameuse « maladresse des habiles » de François Mauriac. Quand le talent est annoncé il devient ridicule, c’est aujourd’hui le lot quotidien des hommes modernes.

 Le débat politique n’est pas la discussion politique ni le dialogue politique. Le débat politique c’est l’émission de la parole politique autour d’une grande querelle : Faut-il plus ou moins d’autorité dans nos pays en voie de développement ? Voilà une ne question  radicalement politique ! A quoi sert une société ouverte comme le Sénégal ? Mais le plus grand débat aujourd’hui, le plus difficile pour tous les africains comme les européens est la question de la souveraineté. Faut-il adhérer ou non au gouvernement mondial ? Toutes les autres questions sont subsidiaires. Ils sont rares à en débattre tellement qu’ils sont pris par une sorte de delirium tremens comme dans les mauvais films d’horreur. Ils font peur ces zombis politiques. La principale menace contre la vie moderne est le cannibalisme politique, ces politiciens qui nous tuent, l’enkystement par de mauvaises habitudes et l’insouciance politique dont le sommet est l’indifférence des partis politiques face au débat autour du Franc CFA qui du reste n’est pas plus vital que la question de l’Education nationale. C’est terrible !

C’est à croire que la politique n’a pas échappé au superflu. Tout ce qui est superflu est inutile, artificiel, superficiel. Depuis que les hommes politiques, maitres de la parole n’enrichissent plus la langue, c’est la fin du débat politique.  Les hommes politiques,  de Périclès à Abdoulaye Wade en passant par Talleyrand, le Cardinal de Richelieu, George Clemenceau, Jean Jaurès,  Léon Blum, Charles De Gaulle, Abraham Lincoln, Konrad Adenauer, John Fitzgerald Kennedy, le président Lamine Gueye et même le fameux camélion l’ivoirien Laurent Dona Fologo ont enrichi la langue par leur bonne expression et leur sens de la répartie et de la bonne formule. C’est étrange mais il faut dire qu’au Sénégal les membres du patronat s’expriment mieux que les politiciens : Diagna Ndiaye, Baydy Agne et Mansour Kama sont de loin plus  à l’aise que Khalifa Sall, Ousmane Tanor Dieng et Oumar Sarr. Chez les plus jeunes, confrontés aux problèmes d’éducation et de formation c’est le désastre. Ils parlent douloureusement le français et …l’Ouolof.  Mais il ya des exceptions notables que sont Idrissa Seck, Dialo Diop et Moustapha Niasse.

Depuis que le débat politique n’arrive plus à être modulé selon la bonne fréquence, les politiciens  d’aujourd’hui au timbre de la voix grésillante, n’arrivent plus à émettre à haute fréquence à force d’imitation et de singeries jusque dans les expressions. La politique c’est l’art de vivre selon les grandes vertus.

Khalifa Touré



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